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La Saint-Valentin, jour des amoureux, se fête aussi dans des pays arabes

La Saint-Valentin, jour des amoureux, se fête aussi dans des pays arabes

La Saint-Valentin n’est pas une fête traditionnelle dans le monde arabo-musulman et malgré des tentatives d’interdiction dans plusieurs pays, les jeunes montrent souvent leur détermination a célébrer ce jour, devenu plus couramment la fête de l’amour. Si cette fête est bien sûr une opération marketing importante, elle représente aussi un jour symbolique pour des amoureux du monde entier.

Mais, comme le constate le journal Le Monde, magasins, hôtels, restaurants et galeries commerciales se préparent depuis plusieurs jours à la célébration de la Saint-Valentin dans le monde arabe.

La popularité d’une telle fête est relativement récente et n’avait rien d’évident dans une région très majoritairement musulmane. Des trois saints célébrés le 14 février, Valentin, décapité vers 270, serait devenu patron des amoureux pour avoir correspondu avec sa bien-aimée jusqu’au jour de son martyre. La réalité historique est bien éloignée d’un telle légende et il faut attendre le XIXème siècle pour que la mode des « Valentins », les billets doux adressés entre amoureux à cette occasion, ne se répande en Europe, avant que la fête n’atteigne la popularité planétaire que l’on sait. Le succès de la Saint-Valentin dans le monde arabe n’en est que plus intéressant à étudier.

L'analyse du journal Le Monde

La célébration d’un saint chrétien a longtemps été déconseillée, voire proscrite, par les autorités islamiques, d’autant que la Saint-Valentin ne représenterait que la christianisation d’un rite païen associé au dieu de la Fécondité, Lupercus, dans l’Antiquité romaine. Cette combinaison sulfureuse ne pouvait que troubler les oulémas, littéralement ces « savants » de l’Islam, qui sont censés édicter les normes à suivre par les fidèles.

Les régimes contemporains qui se prévalent d’une forme de légitimité religieuse en ont rajouté dans les restrictions, qu’il s’agisse de la Malaisie, où des dizaines de personnes avaient été arrêtées en 2011 sur la base d’une fatwa proscrivant la Saint-Valentin; de l’Indonésie, où cette fête avait été en partie interdite en 2012;  de la République islamique du Pakistan, où la Haute Cour avait instauré une prohibition similaire en 2017; de l’Iran, où les célébrations publiques sont interdites, même si les festivités privées sont tolérées.

Dans le monde arabe, seule la monarchie saoudienne se distinguait par une ligne aussi « dure ».  La vente de tout produit rouge y avait été bannie en février 2008, ce qui n’avait fait qu’entraîner le développement d’un marché parallèle de roses rouges, vendues à six fois leur prix. Mais cette prohibition a été suspendue au bout de dix ans, sur fond de « modernisation » autoritaire par le prince héritier, Mohammed Ben Salman, le véritable homme fort de la monarchie, qui a sévèrement bridé les activités de la police religieuse. L’ancien chef de cette police à La Mecque, le cheikh Ahmed Qassem al-Ghamdi, a même déclaré en 2018 que « c’est un acte de bonté d’échanger des voeux pour les fêtes occidentales, nationales et sociales, y compris la Saint-Valentin, où il est licite d’échanger des roses, à condition que ce soit avec des personnes pacifiques qui n’entretiennent aucune animosité ou hostilité à l’encontre des Musulmans ». Une telle ouverture du royaume wahhabite avait été précédée dans le reste du monde arabe par des déclarations de tolérance envers la Saint-Valentin, émises par les plus hautes autorités religieuses, entre autres en Egypte et en Tunisie.

(...)  Il serait cependant erroné de réduire la Saint-Valentin à un simple rite consumériste. Les photographies ci-dessus témoignent de l’affirmation à cette occasion d’une authentique pulsion de vie, que ce soit dans la Bagdad ravagée par la guerre civile et les attentats, ou dans Rakka, berceau en 2013 du bien mal nommé « Etat islamique » et libérée du totalitarisme jihadiste quatre années plus tard. La volonté de célébrer la fin d’un tel cauchemar est alors évidente, en dépit des étalages de plus ou moins bon goût que la Saint-Valentin favorise. Pour une ancienne candidate aux municipales saoudiennes, la tolérance actuelle pour la Saint-Valentin permet de conjurer les souvenirs de la répression, jusqu’à tout récemment, de cette fête des amoureux: « cela a créé une nouvelle culture qui est très agréable, qui promeut l’amour et la paix, car toute opportunité doit être saisie pour exprimer l’amour ». L’amour et la paix, la paix et l’amour, Peace and love, le monde arabe en a assurément besoin, et pas seulement le 14 février.

(Extraits du Journal Le Monde du 13 février 2022)

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A Djeddah, un atelier de peinture pour les couples pour la Saint-Valentin

Un atelier destiné aux couples qui souhaitent célébrer la Saint-Valentin de manière tendre et unique est organisé à l’Art Space Center de Djeddah.

L’idée est que chaque partenaire crée une œuvre d’art sur sa toile individuelle. Les deux toiles sont ensuite réunies comme les deux pièces d’un puzzle. Une peinture se fond dans l’autre, et sans l’une ou l’autre, l’image est incomplète, tout comme les personnes qui les ont créées.

Afrah Mohammed, responsable du développement commercial du centre, a expliqué le raisonnement qui sous-tend cette activité.

« Nous avons eu cette idée l’année dernière. Nous avons d’abord organisé l’atelier pour les couples à l’occasion de la Saint-Valentin, puis pour les mères et leurs enfants à l’occasion de la fête des mères », explique-t-elle à Arab News.
« Nous sommes heureux que cet atelier ait connu un tel succès. Les gens y ont vu une occasion d’exprimer leur amour de manière tangible et, à la fin de l’atelier, ils ont pu emporter les tableaux chez eux pour les conserver comme un beau souvenir », poursuit-elle.
Les participants n’ont pas besoin de compétences artistiques particulières pour prendre part à l’atelier, mais doivent être prêts à s’amuser et à passer de bons moments avec leur partenaire, souligne Mme Mohammed.

Cela pourrait les aider à « découvrir la façon dont leurs énergies s’entrelacent à travers les couleurs, les formes et les lignes », ajoute-t-elle.
« Ils pourraient découvrir des aspects intéressants les uns sur les autres et finir par se rapprocher encore plus. »
L’Art Space Center est ouvert à tous et propose une série d’ateliers et d’autres activités.

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