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Qui se cache derrière "Millî Görüs", l'association qui porte le projet contesté de la mosquée de Strasbourg ?

Qui se cache derrière "Millî Görüs" ?

Financement de la mosquée de Strasbourg, refus de signer la Charte de l'islam... L'association turque Milli Gorus fait parler d'elle depuis plusieurs semaines. Explications avec ladepeche.fr.

(La Dépêche) - La loi de séparation des Eglises et de l’Etat n’est pas appliquée en Alsace-Moselle, et depuis 1999, la ville de Strasbourg propose une aide à tous les lieux de culte. C'est pour cela que la municipalité EE-LV de la ville a prévu de financer, à hauteur de 10 %, l'immense construction de la mosquée alsacienne. Un projet porté par l’organisation turque Millî Görüş. Une association pointée du doigt par le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin.

L'organisation politico-religieuse Millî Görüş (CIMG) a été créée à la fin des années 1960 en Allemagne par Necmettin Erbakan, ancien Premier ministre turc, et s'est installée progressivement en Europe occidentale, sous l'impulsion de membres de la diaspora turque présente outre-Rhin. 
La CIMG est aujourd'hui présente dans 70 lieux de culte en France. Un autre groupe turc, le Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF), pilote 270 des quelques 2500 mosquées présentes sur le territoire. 14% des mosquées du pays sont donc liées à la Turquie.

Une association proche de l'Etat turc

Si le CIMG est bien une association française, il est intimement lié au pouvoir turc. Le Comité dépend de la Diyanet, la direction des affaires religieuses du gouvernement. L'association est aujourd'hui très proche de l'AKP, le parti du président Erdogan, chef de la section jeunesse dans les années 1990.

Le 15 janvier dernier, l'associaton de la CIMG de Sarcelles, se faisait remarquer par un post Facebook commémorant les cinq ans de l'échec du coup d'Etat contre Erdogan.

Dans les colonnes du Parisien, Jean Marcou, professeur à Sciences-po Grenoble et spécialiste de la Turquie contemporaine revenait sur les motivations du groupe :  "Ils ont le même projet que les Frères musulmans : faire de l'islam politique." 

Les relations tendues entre Paris et Ankara n'ont pas arrangé la position de Millî Görüş. À l'automne, Emmanuel Macron avait évoqué "le séparatisme islamiste", et fustigé "une politique de mensonges d'Etat relayés par les organes de presse contrôlés par l'Etat turc". Depuis, ses relations avec son homologue turc sont quelque peu tendues.

Refus de signer la "charte" de l’islam de France

Étudiée depuis le mois de janvier, la  Charte des principes de l’islam de France est selon Emmanuel Macron, "un engagement net, clair et précis en faveur de la République". Un texte poussé par le président du Conseil français du culte musulman (CFCM) Mohammed Moussaoui, qui démontre que "les principes de la foi musulmane sont complètement compatibles avec les principes de la République". Mais trois fédérations, dont deux Turques - Millî Görüş et le CCMTF -, ont refusé de signer cette charte.

Une déclaration de Marlène Schiappa sur LCI a ensuite ravivé les tensions entre les fédérations et le pouvoir français. La ministre déléguée à la Citoyenneté a ainsi déclaré que "L'idée [de la charte], c'est de dire 'comment on s'engage dans la lutte contre l'homophobie' ? Est-ce que ça veut dire que dans les prêches, on considérera que deux hommes ont le droit de s'aimer, de se marier, comme deux femmes ont le droit de s'aimer et de se marier, comme le disent les lois de la République française ? C'est cela que dit cette charte."

"Cette déclaration déplorable, démontre une fois de plus l’ingérence des politiques dans le religieux et ceci n’est plus supportable, a dénoncé, le 25 mars dernier, la Confédération islamique de Millî Görüş France. Madame la ministre déléguée s’appuie, pour annoncer cela, sur la charte des principes de l’Islam de France tout comme le ministre de l’Intérieur."

L'association turque estime par ailleurs que "les déclarations politiques des personnes exerçant des fonctions à responsabilité au sommet de l’Etat, telles que Madame Schiappa et Monsieur Darmanin, et leurs façons d’interpréter voire même de dénaturer cette charte démontre de façon éclatante qu’il reste des points à éclaircir dans son contenu".

Fiona Bonassin
La Dépêche

 
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