Maglor - Il y a une semaine, l'écrivain algérien, Boualem Sansal, également détenteur de la nationalité française, disparaissait mystérieusement dès son arrivée à l'aéroport d'Alger en provenance de Paris. Depuis, aucune nouvelle de l’auteur, connu pour ses positions critiques envers le régime algérien, ne filtre. Son absence prolongée alimente les spéculations, notamment sur le lien possible entre son sort et ses récentes déclarations controversées.
Quelques jours avant sa disparition, Sansal avait accordé une interview à un quotidien français dans laquelle il évoquait une vérité rarement prononcée publiquement en Algérie : selon lui, une grande partie de l’Ouest algérien, comprenant des villes comme Tlemcen, Oran et Mascara, appartenait historiquement au Maroc avant d’être annexée par la France pendant la colonisation. Il avait également mentionné le cas d'autres territoires de l'Est marocain incorporés à l’Algérie coloniale. Ces propos, d’une portée historique et politique sensible, ont mis en lumière un sujet longtemps tabou : la question des frontières issues de l’héritage colonial.
Une réponse sévère du régime algérien
Ces déclarations, considérées comme explosives, auraient irrité les autorités algériennes au point de provoquer une réaction radicale. Selon plusieurs observateurs, Sansal serait détenu dans un lieu inconnu, soumis à des interrogatoires intenses et, peut-être, à des mauvais traitements. La gravité de la situation pousse certains à craindre une condamnation sévère en vertu des lois strictes en vigueur en Algérie, notamment celles encadrant les questions militaires et les atteintes à « l’unité nationale ».
Une mobilisation en France pour la libération de Sansal
Le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) a exprimé, dans une publication, son soutien à Boualem Sansal, le qualifiant de « cet écrivain de lumière, défenseur des valeurs universelles, qui affronte l'obscurantisme ». Le CRIF a également exigé sa libération immédiate.
La nouvelle de l’arrestation de Sansal par les services de sécurité algériens a déclenché un état d’urgence au sein de la classe politique française, à commencer par le président Emmanuel Macron, qui a exprimé une vive inquiétude face à cet événement. L’entourage du président a confié à la télévision française que « les services de l’État français sont mobilisés pour clarifier la situation de l’écrivain Boualem Sansal », âgé de 75 ans, tout en soulignant que Macron reste fermement attaché à « la liberté d’un écrivain et d’un grand intellectuel ».
Une affaire embarrassante pour l'Algérie et la France
Cette disparition embarrasse non seulement l’Algérie, mais aussi la France, qui doit maintenant protéger un citoyen victime d’un régime accusé de répression et d’atteintes à la liberté d’expression. Cette affaire s'ajoute à une liste croissante de désaccords entre les deux pays, dont le plus récent est la reconnaissance par Paris de la souveraineté marocaine sur le Sahara.
En Algérie, le cas Sansal met également en lumière une nouvelle fissure au sein de l’opinion publique. Certains Algériens, allant à contre-courant de la position officielle de leur gouvernement, semblent soutenir les revendications marocaines concernant les territoires frontaliers et le Sahara. Ce soutien inattendu souligne l’incapacité du régime à convaincre même sa propre population de la véracité de son discours sur ces questions historiques.
Une stratégie vouée à l'échec ?
En agissant ainsi, le régime algérien expose son visage autoritaire dans un contexte mondial marqué par la montée en puissance des droits humains et de la transparence. La disparition de Boualem Sansal rappelle les pratiques répressives d’un autre âge et risque de ternir davantage l’image de l’Algérie à l’international.
Si le silence autour de Sansal persiste, cette affaire pourrait devenir un nouveau point de tension majeur entre l'Algérie et la France, tout en renforçant les critiques envers le régime algérien, accusé d’opacité et de manipulation de l’histoire.
Boualem Sansal, figure de la dissidence intellectuelle, devient aujourd’hui le symbole d’une lutte pour la liberté d’expression face à un pouvoir incapable de faire face à ses propres contradictions historiques. Quant à l’avenir, il reste à voir si cette affaire déclenchera une prise de conscience au sein du régime ou si elle marquera un nouveau pas vers l’isolement diplomatique et politique.