Depuis dix ans, l'Université de la Grande Région (UniGR) regroupe les universités de quatre pays fondateurs de l'Union européenne. Aujourd'hui, emportée par la volonté d'Emmanuel Macron de constituer des «réseaux d'universités», elle a la ferme intention de devenir «l'une des premières universités européennes». Un article du Luxemburger Wort.
«Un réseau d'universités de plusieurs pays d'Europe, mettant en place un parcours où chacun de leurs étudiants étudiera à l'étranger et suivra des cours dans deux langues au moins». C'est ainsi qu'Emmanuel Macron, à l'occasion de plusieurs discours, a récemment défini sa vision de «l'université européenne».
«Nous voyons dans l'appel du président Macron un moyen d'aller plus loin, de constituer une université plus attractive et tournée vers l'extérieur», a soutenu Pierre Mutzenhardt, président de l'Université de la Grande Région (UniGR) et de l'Université de Lorraine, ce mercredi 30 mai.
«Aucun autre réseau d'universités en Europe n'est aussi développé»
L'UniGR a bien l'intention de devenir l'une des premières de ces universités européennes. Depuis 10 ans, cette union regroupe les universités de Liège, de Kaiserslautern, de Trèves, de Lorraine, du Luxembourg et de la Sarre.
Pas moins de 135.000 étudiants, 7.000 doctorants et 10.000 enseignants chercheurs y parlent quotidiennement trois langues. Pierre Mutzenhardt est catégorique: «Il y a d'autres réseaux d'universités en Europe, mais je pense qu'aucun n'est aussi développé que celui-ci. Il a suivi un cheminement doux mais efficace». Une affirmation nuancée par le directeur de l'Université de Trèves, Michael Jäckel, pour qui «le réseau universitaire EUCOR, dans le Rhin supérieur, est comparable au nôtre».
Pour Manfred Schmitt, Vice-Président de l'UniGR et Président de l'Université de la Sarre, l'union des universités sera surtout favorable au développement de l'esprit critique de ses étudiants. «Il faut transmettre aux étudiants une idée de ce qu'est l'Europe aujourd'hui», affirme-t-il. «Il nous appartient de préparer les générations futures à faire la part des choses, à développer une sorte de boussole».
Pour les étudiants, «une plus-value exceptionnelle bien que difficile à décrire»
Quelles sont les conséquences de cette volonté d'unification universitaire, qui perdure depuis 10 ans et tend à s'affirmer, pour les étudiants de la Grande Région ? L'UniGR propose 19 formations transfrontalières, qui font voyager les étudiants au cours de leur cursus. «C'est une formidable valeur ajoutée pour eux», s'enthousiasme Pierre Mutzenhardt. «Une fois diplômés, ils sont plus à même de s'adapter à des environnements différents».
L'union propose, par exemple, le cursus Saar-Lor-Lux, qui prodigue une formation générale en physique au sein des universités de Nancy, Sarrebruck et Luxembourg. À noter également, le master de «Border Studies», qui enseigne un programme de sciences humaines et sociales orienté autour des problématiques frontalières, et emmène ses étudiants au sein de 4 universités de la Grande Région. «C'est une plus-value difficile à décrire, mais elle est exceptionnelle», se réjouit Pierre Mutzenhardt.
Mais cette fameuse plus-value ne concerne que les étudiants qui suivent des formations internationales. Qu'en est-il de ceux qui étudient au sein d'universités fixes, dans des cursus plus traditionnels ? Selon le Président de l'UniGR, «cela leur apporte également, par la possibilité d'accomplir des stages à l'étranger par exemple».
«Le Luxembourg ne peut que s'enorgueillir de son université»
Le 12 août 2003 est fondée l'Université du Luxembourg, par adoption d'une loi sur l'enseignement supérieur. Quinze ans plus tard, elle s'étend au-delà de la ville de Luxembourg puisque son objectif n'est autre, à terme, que la création d'un campus unique sur l'ancienne friche industrielle de Belval. Malgré sa jeunesse, les mastodontes universitaires des pays limitrophes voient son évolution d'un bon œil.
«Notre regard a évolué», confie Pierre Mutzenhardt, qui est à la tête de l'Université de Lorraine. «Lors de sa création, nous étions interrogatifs: quelle direction allait-elle prendre ? La fondation d'une université, en Europe, c'est très rare. Celle du Luxembourg a relevé un formidable défi. C'est une très belle université, qui est en train de prendre sa maturité».
À entendre le président de l'Université de Lorraine, nombre de professeurs ayant rejoint celle du Luxembourg lors de sa création y travaillent encore, ce qui est un signe de bonne santé. «Cela signifie qu'elle propose un bon environnement intellectuel, et évidemment que ses salaires sont corrects».
L'Université de Lorraine collabore déjà régulièrement avec l'Université du Luxembourg par le biais d'échanges de professeurs intervenants. «D'ailleurs, on pourrait s'agacer car ils nous ont piqué des profs lors de leur création», plaisante Pierre Mutzenhardt. «Mais on a une belle entente».
L’Université de la Grande Région a vu le jour grâce à une subvention de l’Union européenne dans le cadre du programme Interreg IV A Grande Région. Ratifié en septembre 2008, le projet « Université de la Grande Région » a débuté le 15 octobre 2008 et s’est terminé au printemps 2013. Outre le co-financement de l’Union européenne, ce projet bénéficiait du soutien des six universités partenaires ainsi que du Land de Sarre, de la Wallonie, de la région Lorraine et du Land de Rhénanie-Palatinat.
Depuis la fin de la phase projet, "l'Université de la Grande Région" poursuit ces activités en tant que groupement universitaire transfrontalier, doté d’une forme juridique depuis 2015.
L’Université de la Grande Région est un réseau qui regroupe six universités (Universités de Kaiserslautern, de Liège, de Lorraine, du Luxembourg, de Sarre et de Trèves) implantées sur l’espace frontalier de la Grande Région (Allemagne – Rhénanie-Palatinat et Sarre ; Belgique – Wallonie, Communautés française et germanophone de Belgique ; France – Région Grand-Est (Lorraine) ; Grand-Duché du Luxembourg).
- 6 universités
- 4 pays
- 3 langues d’enseignement (français, allemand, anglais)
- Plus de 135.000 étudiants
- Près de 7.000 doctorants
- Plus de 10.000 enseignants-chercheurs