Maglor - « L’objectif est de réduire l’immigration, notamment l’immigration illégale, et de ne pas régulariser systématiquement », a expliqué ce vendredi 24 janvier Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, sur Europe 1-CNews, au lendemain de la présentation d’un nouveau texte visant à encadrer les régularisations des sans-papiers.
Le ministre, qui a fait de la lutte contre l’immigration sa priorité depuis son entrée au gouvernement en septembre, a adressé une circulaire aux préfets pour mettre un terme aux « régularisations systématiques ». Si le texte ne modifie pas directement les critères d’admission exceptionnelle au séjour (AES), il remplace la circulaire de Manuel Valls, qui offrait une certaine latitude aux préfets pour régulariser des situations particulières en dérogation aux règles traditionnelles.
Depuis 2012, cette circulaire permettait de régulariser environ 30 000 personnes par an sur des motifs familiaux, économiques ou étudiants, au titre exceptionnel. Mais selon Bruno Retailleau, pour réduire l’immigration illégale, il ne faut pas procéder à une régularisation massive : « Si on régularise de manière trop quantitative, on récompense l’irrégularité et ceux qui ont fraudé », a-t-il justifié, sans toutefois préciser un objectif chiffré.
Si le ministre n’a pas annoncé de chiffres précis pour ses objectifs, la nouvelle politique inquiète certains acteurs politiques et économiques. Roland Lescure, député d’Ensemble pour la République, a qualifié cette démarche de « caricature », soulignant qu’elle contrevenait aux valeurs républicaines et favorisait les politiques du Rassemblement national (RN). Claire Lejeune, députée de La France Insoumise (LFI), et Marie-Charlotte Garin, députée écologiste, ont dénoncé ce qu’elles appellent une « hypocrisie crasse », mettant en lumière l’exploitation de travailleurs sans-papiers dans l’ombre tout en les excluant publiquement.
Du côté des entreprises, notamment celles des secteurs de l’hôtellerie-restauration, des inquiétudes émergent. La nouvelle version du texte allonge la durée de présence en France nécessaire pour la régularisation d’un travailleur sans-papiers, de cinq à sept ans, voire trois ans dans certains cas. Frank Delvau, président de l’Union des métiers de l’hôtellerie-restauration (Umih) d’Île-de-France, a exprimé ses préoccupations sur FranceInfo, soulignant que cette politique pourrait créer des difficultés pour les entreprises qui peinent à recruter.
Bien que le ministre estime que « l’immigration n’est pas une chance », il a fait savoir qu’il ne comptait pas s’arrêter là et qu’il préparerait prochainement une circulaire concernant les naturalisations, dans la même optique. Bruno Retailleau, qui a déjà tenté sans succès de durcir la loi immigration lorsqu’il était à la tête des Républicains (LR) au Sénat, s’appuie sur un contexte international de plus en plus hostile à l’immigration, avec la montée des partis d’extrême droite. Lors de ses rencontres avec ses homologues européens, il déclare que la question de l’immigration est désormais partagée par une majorité de Français, à droite comme à gauche. Cependant, ces nouvelles restrictions risquent d’aggraver la précarité des personnes sans-papiers et de susciter des inquiétudes parmi les citoyens français, comme l’a souligné la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS).