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Affaire de la cocaïne saisie à Oran : Jusqu’où ira l’enquête ?

Les dossiers de corruption en cascade, les détournements en règle et maintenant cette scabreuse affaire de cocaïne sur fond de crise politique ont largement contribué à la dislocation du tissu social. Ils précipitent la désagrégation du lien national.

L’éclatement de l’affaire de la cocaïne, ses implications et ses conséquences immédiates avec l’éviction du Directeur général de la Sureté nationale (DGSN), Abdelghani Hamel, jette le discrédit sur la préparation de l’élection présidentielle. Déjà plongée dans un brouillard total, la préparation de cette échéance décisive qui devrait avoir lieu dans dix mois est désormais confrontée à de sérieuses difficultés.

Car dans les calculs du sérail, l’épisode de l’éviction d’un élément-clé dans le dispositif présidentiel n’était pas prévu. Il vient perturber sérieusement un processus mal engagé et difficilement mené. Un grain de sable qui enraye la machine. Un séisme politique dont les répliques risquent d’être de la même ampleur.

Très proche du président de la République auprès duquel il jouit d’une «traitement» particulier, Abdelghani Hamel à la tête d’une police aux effectifs pléthoriques incarne une force de persuasion, une force aux capacités d’action non négligeables. Se séparer de lui dans la précipitation et manifestement par contrainte, le président de la République perd ainsi un atout majeur dans son staff et une carte déterminante dans l’organisation du futur rendez-vous politique.

M. Hamel était plus qu’un Directeur général de la Sûreté nationale. Mais il était difficile de garder un allié devenu brusquement encombrant. Abdelghani Hamel, visiblement excédé par la manière avec laquelle est gérée l’affaire de la cocaïne et ses «dérivés», n’a pas pu tenir sous la «pression». Il a craqué. Inhabituel pour un patron d’une force armée. Son éviction pour le moins brutale va sans doute être «capitalisée» par ses adversaires dans le sérail dans les batailles d’influence que se livrent les différents groupes en vue du renforcement de situations de puissance.

Ça «snife» la manœuvre. Inévitablement, le scandale de la cocaïne sera exploité politiquement. Il servira de prétexte pour des règlements de comptes, à «couper les têtes», à affaiblir ou à renforcer les positions au sein du pouvoir. Il n’est un secret pour personne qu’entre Abdelghani Hamel, patron de la police et Ahmed Gaïd Salah, chef d’état-major, le «courant ne passait pas».

Les deux personnages n’ont jamais fait bon ménage, d’autant que le premier a, dès son installation au 01, Boulevard Mohamed Ouanouri (Bab El Oued) a souvent «irrité» le second en se donnant les allures d’un homme puissant qui jouit grandement des faveurs du chef de l’Etat. Plus encore, Abdelghani Hamel nourrissait au fond de lui-même une ambition politique suprême en soignant son image en interne et à l’extérieur avec une stratégie de communication bien orchestrée.

Ses «relais» n’hésitaient pas à lui «tailler un costume» présidentiel et le mettre en avant comme étant «un potentiel prétendant» au palais d’El Mouradia. Inutile de dire qu’avec la Gendarmerie nationale le courant ne passait pas non plus. Les deux institutions se regardaient en chiens de faïence. Un classique qui n’est pas propre à l’Algérie par ailleurs.

D’évidence, après son «exécution» il voit son «rêve» s’écrouler. Difficile de se relever d’une telle chute. Mais au-delà des ambitions contrariées de Abdelghani Hamel, c’est l’ensemble du climat politique qui s’assombri davantage. L’impact de l’affaire de la cocaïne et ses ramifications est immense sur l’opinion. La nature des institutions touchées par ce nouveau scandale aura des incidences majeures sur l’Etat dont l’autorité ne cesse d’être sapée par ses propres agents. Ce nouveau scandale qui vient «grossir» un registre peu glorieux en matière d’«affaires» va considérablement renforcer la méfiance entre les citoyens et les institutions. Les Algériens s’inquiètent sérieusement et légitimement.

Comment ne pas l’être quand ils apprennent qu’un magistrat, un directeur central, un ministre ou un officier doit sa nomination à un homme d’affaire douteux ? L’argent sale et violent se révèle non seulement influent, mais il gangrène jusqu’au plus haut sommet. Les dossiers de corruption en cascade, les détournements en règle et maintenant cette scabreuse affaire de cocaïne sur fond de crise politique ont largement contribué à la dislocation du tissu social. Ils précipitent la désagrégation du lien national.

Cependant, et au-delà des personnes — certes responsables de leurs actes —, c’est tout le système politique dans son ensemble, par sa nature et son fonctionnement, qui est le générateur des dérives multiples. C’est un système crisogène. Non seulement il ne protège ni les citoyens ni les institutions publiques déligitimées et affaiblies, il vampirise l’Etat qui est déjà à terre. La situation nationale dans sa globalité présente des symptômes d’un profond malaise.

Les capacités de résistance s’affaiblissent à coups de scandales et les ressorts craquent à tous les niveaux de la société. Trop fragile en interne et cerné par un environnement instable et menaçant, le pays se trouve surexposé à des périls sérieux. D’où l’urgence de sortir vite et par le haut en brisant l’impasse politique angoissante.

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