Au Conseil des droits de l’Homme de l'ONU, l’Algérie a été appelée à autoriser le Haut-Commissariat aux réfugiés à recenser la population des camps de Tindouf. La question des avoirs des Marocains expulsés de ce pays en 1975 a également été soulevée.
La 33e session du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU, tenue à Genève du 18 juin au 6 juillet, a connu l’Examen Périodique universel du cas de l’Algérie. Les représentants du voisin de l’Est étaient appelés à répondre aux nombreuses questions émanant d’ONG internationales et de membres de l’organisme onusien sur les violations des libertés dans ce pays, énoncées dans la Charte des Nations unies.
La situation dans les camps de Tindouf n’a pas échappé aux interrogations des intervenants. Le Centre d’Action pour le Développement Rural a «dit lutter pour dénoncer le mutisme sur les atrocités dans les camps de réfugiés sahraouis près de Tindouf en Algérie. La plupart des tortionnaires occupent aujourd’hui de hautes fonctions dans l’administration du Front Polisario», a regretté l’ONG.
De son côté, l’Association Dunenyo «a attiré l’attention sur la situation alarmante dans les camps de Tindouf et l’impuissance du Haut-commissariat pour les réfugiés à obtenir l’autorisation de l’Algérie de mener une opération concrète de recensement des populations sahraouies de ces camps». Depuis 2011, le Conseil de sécurité insiste en effet dans ses résolutions sur le Sahara occidental à recenser la population des camps, en vain.
Des intervenants ont également critiqué «le système gouvernemental et juridictionnel «parallèle» mis en place sur les camps de réfugiés de Tindouf par le Polisario», rapporte le site TSA. Il a été demandé à l’Algérie de mettre fin à cette situation «contraire à ses obligations générales afin d’assurer le respect des droits garantis par le Pacte pour toute personne se trouvant sur son territoire et sa juridiction», ajoute la même source.
A Genève, la délégation algérienne a préféré regarder ailleurs. Dans sa réponse, elle a observé que «dans l’ensemble des missions de maintien de la paix, la seule qui n’a pas un volet droits de l’Homme est la Minurso (Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental), en raison de l’opposition de certains pays», allusion au Maroc.
Et de plaider pour l’instauration d’«un mécanisme impartial pourra établir les violations des droits de l’Homme dans les camps de Tindouf. Il n’appartient pas au pouvoir judiciaire algérien d’aller régir ce qui se passe entre les réfugiés temporaires dans le pays. Il faut se poser la question de savoir pourquoi ces personnes se retrouvent réfugiés dans un pays tiers», rapporte TSA.
Le cas des Marocains expulsés d’Algérie
Par ailleurs, la question des avoirs des Marocains expulsés d’Algérie en 1975 a été soulevée par les ONG. Dans sa réponse, le chef de la délégation algérienne a accusé le Maroc «d’avoir torpillé le processus en prenant des mesures unilatérales. Cependant, la partie algérienne est prête à continuer à faire des efforts dans ce domaine», soulignant que la plupart des Marocains concernés n’avaient pas de titres de propriété.
Rabat et Alger avait mis en place un cadre pour traiter ce problème. Néanmoins, sa dernière réunion remonte à 2003. Depuis les Algériens ont décliné toutes les invitations des Marocains de se retrouver pour aborder le sujet.
Mohammed Jaabouk, Journaliste Yabiladi.com
Marocains expulsés d’Algérie : Une souffrance qui dure depuis 1975
En 1975, les autorités algériennes procèdent à l’expulsion de quelques 45 000 familles marocaines d’un seul coup, le jour de l’Aïd Al Adha, fête religieuse célébrée par les musulmans du monde. Plus de quarante ans après, les plaies de ces Marocains sont restées ouvertes.
La célébration, le mois prochain, de l’Aïd Al Adha par le peuple marocain n’est pas seulement une occasion de fête. Certains se souviennent encore d’un événement douloureux ayant marqué leurs vies à jamais. En 1975, en pleine célébration de cette fête religieuse, l’Algérie voisine expulse 45 000 familles marocaines, vers les frontières avec le royaume. Une réponse du régime politique de Houari Boumédiène à la Marche verte organisée par feu le roi Hassan II.
Si l’incident n’est que le cumul de plusieurs différends entre les deux frères-ennemis, l’expulsion a impacté la vie de plusieurs centaines milliers de Marocains qui considéraient jusque-là l’Algérie comme leur deuxième pays.
Malika dit attendre son père disparu il y a plus de 40 ans
A Taza, Berkane, Oujda, Nador et Rabat, Yabiladi est allé à la rencontre de plusieurs de ces Marocains, dont les souvenirs diffèrent d’une personne à l’autre.
A Berkane, Malika Zaoui avait 14 ans lorsqu’elle a été expulsée, tout comme sa famille, d’Aïn Témouchent (située à l'ouest de l'Algérie entre les wilayas d'Oran, Tlemcen et Sidi-Bel-Abbès) en décembre 1975. «Des policiers algériens sont venus demander à mon père de se rendre au commissariat parce que les autorités procèdent à un recensement des Marocains dans ce pays», confie-t-elle. Mais les choses changent lorsque son père se rend pour enregistrer les membres de sa famille. Il apprend alors que les Algériens comptent expulser les Marocains vers leur pays.
Malika, sa mère et ses frères se séparent de leur père et ce sera même «la dernière fois» qu’ils le verront. Depuis 1975, cette mère de famille dit encore attendre le retour d’Omar Ould Mimoun. «Nous sommes partis, des années plus tard, au commissariat en Algérie pour demander de ses nouvelles. Ils m’ont dit qu’il n’y aucune trace de lui», poursuit-elle.
Cette Berkanie dit ne pas perdre l’espoir de retrouver son père, même après plus de 40 ans :
«Je me dis qu’un jour, il frappera à ma porte et entrera, ou qu’on diffusera sa photo dans l’émission Moukhtafoun (personnes disparues, sur la chaîne 2M, ndlr). Dans la mesure où il n’a pas de tombe et qu’ils ne disent pas qu’il serait mort, cela veut dire qu’il est toujours vivant. Des fois, je m’isole et pleure en m’attachant à cet espoir.» Malika Zaoui