Maglor - En octobre dernier, un tournant stratégique majeur s’est opéré dans le paysage énergétique européen. L'Algérie, pour la première fois, a détrôné la Russie en tant que principal fournisseur de gaz naturel de l'Union européenne. Selon les données publiées par Eurostat, ce changement était prévisible, dans un contexte de tensions croissantes entre l'Europe et Moscou, exacerbées par la guerre en Ukraine.
Une performance remarquée
Les exportations de gaz algérien vers l’Europe ont atteint 1,3 milliard d’euros en octobre, soit une augmentation de 200 millions d’euros par rapport au mois précédent. Cela représente 21,6 % des importations totales de gaz de l'Union européenne, plaçant ainsi l'Algérie devant la Russie, dont les livraisons ont diminué de 6 % sur la même période. À titre de comparaison, les États-Unis se positionnent en troisième place avec 1,2 milliard d’euros, suivis de la Norvège (777 millions d’euros) et de l’Azerbaïdjan (431 millions d’euros). En tout, les importations de gaz de l’Union européenne ont augmenté de 5 % en octobre, atteignant un total de 6,15 milliards d’euros.
Infrastructures stratégiques
L'Algérie dispose de deux gazoducs principaux : Medgaz, reliant le pays à l’Espagne, et Transmed, qui dessert l’Italie. Toutefois, le gazoduc Maghreb-Europe (GME), passant par le Maroc pour atteindre l’Espagne, reste fermé depuis novembre 2021 en raison de tensions diplomatiques entre Alger et Rabat. Malgré cette fermeture, l’Algérie a su maintenir une progression constante grâce à ses infrastructures modernisées et à une diversification de ses routes d’exportation.
Investissements massifs et ambition à long terme
Pour soutenir cette dynamique, Sonatrach, le géant énergétique algérien, a annoncé un plan d’investissement de 50 milliards de dollars d'ici 2028, dont 36 milliards destinés à l’exploration et à la production de gaz et de pétrole. Ce programme inclut notamment « Boosting Hassi R'Mel », un projet visant à prolonger la durée de vie du principal gisement gazier du pays et à augmenter les volumes extraits.
L’Algérie prévoit également de doubler sa production annuelle de gaz à 200 milliards de mètres cubes d'ici 2028, contre environ 137 milliards actuellement. Cet objectif repose sur un équilibre fragile entre les exportations croissantes et les besoins domestiques, eux aussi en augmentation constante.
Partenariats renforcés
Face à une demande européenne soutenue et au désir de réduire la dépendance vis-à-vis de la Russie, l’Algérie multiplie les partenariats stratégiques avec des pays comme l’Italie, l’Espagne, la France, et l’Allemagne. Ces relations bilatérales sont soutenues par une infrastructure fiable et une capacité à répondre rapidement aux besoins des marchés.
Un rôle clé dans la sécurisation énergétique européenne
L’ascension de l’Algérie comme premier fournisseur de gaz naturel de l’Union européenne marque une étape importante dans la sécurisation énergétique du continent. Ce succès reflète non seulement la stratégie efficace mise en place par Alger, mais également la capacité du pays à s’adapter aux bouleversements géopolitiques mondiaux.
Cependant, des défis subsistent : la stabilité des relations avec ses partenaires, la gestion durable des ressources naturelles et la nécessité de moderniser davantage ses infrastructures. Si ces obstacles sont surmontés, l'Algérie pourrait consolider son rôle de pilier énergétique pour l’Europe, tout en renforçant son économie nationale.