
De violents incidents ont éclaté, notamment à Paris, après la victoire de l'Algérie en quarts de finale de la CAN jeudi soir. La fête à Paris comme dans d'autres villes a dégénéré.
(AFP) - La victoire de l'Algérie a suscité de nombreuses scènes de liesse : les supporters sont descendus dans les rues des grandes villes de France. Mais la fête a été gâchée après que des incidents ont éclaté notamment à Marseille, Paris, Lyon, Roubaix, Tours. Plusieurs dizaines de supporters ont commis des dégradations à l"dlis où plus de 3000 personnes s'étaient réunies pour célébrer la victoire. Les forces de l'ordre ont répliqué avec des gaz lacrymogènes.
En tout, 74 personnes ont été interpellées, dont certaines mineures. Une quarantaine était encore en garde à vue vendredi. Une vin$• taine de policiers ont été blessés.A Marseille, où près de 9 000 personnes - le plus gros contingent de supporters - se sont rassemblées, aucune interpellation n'a eu lieu.
■ Les Champs-Élysées vandalisés Vitrines brisées, dégâts matériels visibles : le quartier des ChampsÉlysées ne montrait pas le meilleur des visages vendredi matin. Une dizaine de commerces ont été touchés. Pour certains, c'est la deuxième fois en quelques mois après les débordements lors des manifestations des gilets jaunes.
Le maire du XVII• arrondissement de Paris, Geoffroy Boulard, ne décolère pas : « Il y a eu à l'évidence un problème de sécurité ». Il demande « des renforts significatifs pour sécuriser la journée et la soirée du 14 juillet », pour la demi-finale.
■ « Le foot, ce n'est pas ça »
« C'est totalement inacceptable », a classiquement réagi Christophe Castaner, le ministre de l'Intérieur. « Le foot, ça n'est pas ça. [ ... ] Ceux qui se sont livrés à cela méprisent à la fois les valeurs du sport, les valeurs du football, mais aussi le pays dont ils ont célébré la victoire dans ce match ». Il promet des sanctions et des moyens supplémentaires pour dimanche. Ce jour-là, l'Algérie rencontre en effet le Nigeria en demifinale.
« j'ai donné l'instruction très claire de préparer la suite des matches de la CAN. j'ai réuni tous les préfets pour qu'il y ait une vigilance maximale ».
■ L'extrême droite en embuscade Le parti de Marine LePenaété le plus rapide et le plus vindicatif pour dénoncer les violences sur les Champs-Élysées, parlant de « rejet de la Frnnce ». « Ces comportements récurrents sont inacceptables, tout autant que le silence des autorités qu'on a connues plus promptes à condamner les manifestations des gilets jaunes 1 » a réagi Marine Le Pen (Rassemblement national). Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) est allé plus loin, réclamant sur twitter un « retour en Algérie » alors même que l'immense majorité des supporters sont Français.
Les autres partis plus prudents
La prudence est toujours de mise dès lors qu'il s'agit de l'Algérie. À part la confrontation habituelle entre les propos du ministre de l'Intérieur et ceux, souvent caricaturaux, de l'extrême droite, il y a un espace dans lequel peu de responsables politiques s'engouffrent. La présidente de la région Île de France, Valérie Pécresse a demandé que les peines pour les actes de vandalismes commis sur les Champs-Élysées soient doublées. Elle déplore en effet que ce soit devenu « le point de rendez-vous des casseurs et des racailles ,, . S'indignant de « débordements aussi inacceptables qu'insupportables », la vice-présidente des Républicains à l'Assemblée, Annie Genev-drd, a réclamé de son côté « une tolérnnce zéro » contre les auteurs de ces violences.
Zohra Bitan: «Ces sauvages nuisent à tout le monde, y compris aux Franco-Algériens!» (déclaration au Figaro)
Pour Zohra Bitan, dans un entretien accordé au Figaro, les voyous qui ont commis ces actes profitent de la faiblesse de l’État. Cadre de la fonction publique territoriale et chroniqueuse aux «Grandes Gueules» de RMC, Zohra Bitan a publié Cette gauche qui nous désintègre (mai 2014, éd. François Bourin).
Zohra BITAN.- La victoire de l’équipe d’Algérie n’a servi que de prétexte pour ces délinquants, qui en ont fait un exutoire. Cela n’a rien à voir avec le football! Un match, ça doit être bon enfant, sportif. Ceux qui sont descendus dans la rue ne sont pas des supporters, mais des voyous. Il s’agit de jeunes qui se sont fabriqué un patriotisme en carton, complètement fantasmé, mais qui n’est pas très sérieux en réalité: si l’on proposait à ces jeunes de retourner vivre en Algérie, pas un n’accepterait. Et pour cause: c’est pas ça, l’Algérie! Je connais bien les mères algériennes, et je peux vous dire que pas une n’accepterait que son gamin se livre à de tels actes. Mais ici, ces jeunes restent impunis et profitent de la faiblesse de l’État, qui ne sait toujours pas lutter contre la délinquance tant notre complexe colonial est encore grand.
D’un côté ils pleurent et se considèrent comme des victimes, et de l’autre, ils donnent tous les ingrédients pour entretenir la suspicion. On ne combat pas l’injustice par le chaos et la haine. Et puis, ils adoptent toujours l’identité qui les arrange: un jour Français, le lendemain Algériens, un autre jour encore musulmans... Personne ne leur a demandé d’aller casser les boutiques des Champs-Élysées. S’il y a un retour de bâton, ils ne pourront s’en prendre qu’à eux.
Ce qui est insupportable, c’est le traitement de faveur qui leur est fait! Quand on est blanc, on n’a pas de circonstance atténuante, alors que si l’on est issu de la diversité, vous avez droit à toutes les excuses du monde. Il faut que cela s’arrête: on doit exiger de tous le même sens des responsabilités, la même exigence. C’est comme cela qu’on construit une communauté nationale. L’égalité des citoyens devant la loi n’est pas négociable. La délinquance doit être réprimée avec la même sévérité, d’où qu’elle vienne. Appliquons aux supporters algériens le même traitement qu’aux «gilets jaunes»!
Le figaro : En Algérie au contraire, les manifestations récentes contre le président Bouteflika ont été d’un remarquable pacifisme...
Zohra BITAN : Absolument, il n’y a jamais eu de violence! Les manifestants sont toujours restés exemplaires, ils observaient le silence quand ils défilaient devant les hôpitaux... Mais en France, on a accepté depuis longtemps cette délinquance. On laisse faire, car les voyous sont tout de suite excusés. Le discours victimaire empêche toute démonstration d’autorité, qui serait automatiquement vue comme une stigmatisation. Et ce sont les Français d’origine maghrébine qui sont les premiers à en faire les frais, puisque ces actes de délinquance portent préjudice à leur intégration. Ces hordes de sauvage nuisent à tout le monde. Et ce n’est pas nouveau! Tant que l’État restera impuissant, et que l’impunité sera la règle, rien ne changera.
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