
On l’appelle Mica car il vend sur les marchés les sacs plastiques, que l’on appelle mika. Il sera employé comme homme à tout faire dans un club de tennis, ne parlant qu’arabe face à des jeunes qui maîtrisent le français et le méprisent.
Avec "Mica", le cinéaste franco-marocain Ismaël Ferroukhi a choisi de montrer la situation sociale du Maroc au travers de la découverte d'un tout nouvel univers mêlant tennis et classes aisées par un gamin venant d'une famille très pauvre.
S'apparentant à un conte moderne, ce film ne manque pas, comme il se doit, d'exagérer la part de cruauté dans sa peinture de certains comportements tout en donnant une ouverture optimiste quant à l'avenir de Mica. Le film est très bien servi par la prestation de Zakaria Inan, l'interprète de Mica, et par celle de la lumineuse Sabrina Ouazani dans le rôle de Sophia.
Africultures (Dakar) propose une analyse très juste du film :
Aux moins jeunes, il propose une réflexion bien menée sur ce dont ont besoin les jeunes pour franchir les barrières sociales. Car Ferroukhi croit beaucoup à la main tendue. Cela a sa limite : dans la réalité, les bonnes fées ne sont pas légion. Et les contes sont des destins individuels alors que le salut passe souvent par la solidarité et la vitalité d’un groupe. Mica risque dès lors de résonner pour beaucoup comme un conte inatteignable. Sans éducation, le sport reste un des seuls moyens de dépasser sa condition sociale, mais pour combien d’exceptions ?
Le film a cependant une belle délicatesse pour encourager à tenter sa chance, à ne pas laisser tomber, à croire à sa bonne étoile, à forcer son destin. La bonne fée est l’entraîneuse Sophia (Sabrina Ouazani, qui a là un rôle à la mesure de sa force de conviction) : elle croit en Mica, le pousse, se heurte aux difficultés mais jamais ne lui fait défaut. Elle est revenue s’installer au Maroc après avoir été championne de tennis en Europe : elle est un certain mirage de modernité. Quant au gardien du club de tennis Hadj Kaddour (imposant Azelarab Kaghat), à qui ses parents ont confié Mica pour le faire travailler, il est plus traditionnel et rude mais a pour lui la droiture et la capacité de sentir les choses.
Tous deux seront là quand Mica n’aura d’autre choix que de revenir à eux. Ils assurent avec constance leur rôle de transmission, qui est au centre du film : l’une comme l’autre initient Mica à surmonter les obstacles malgré sa solitude. Dans un conte de fées, le héros va atteindre ce qui paraît impossible par sa volonté et sa force de caractère. C’est ce que fait Mica, qui puise dans les épreuves, de son enfance difficile aux galères qui suivent, la détermination de les transcender. L’habileté du scénario est de le confronter à des moments charnières où il joue son avenir, misant sur la tension à l’œuvre pour amener l’émotion.