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Hirak Rif : Les meneurs condamnés à 20 ans de prison

53 détenus ont comparu lors de ce procès qui a duré neuf mois. Quatre meneurs du mouvement de protestation sont condamnés à 20 ans de prison, la plus lourde peine prononcée lors de cette audience marquée par l’absence des accusés.

Les meneurs du Hirak, le mouvement de contestation sociale qui a agité le Rif marocain en 2016-2017, ont été condamnés, mardi soir, par la chambre criminelle de la cour d’appel de Casablanca à de lourdes peines de prison, rapporte l’AFP. Au total, 53 personnes comparaissaient lors de ce procès qui a duré neuf mois.

Le leader dudit mouvement, Nasser Zefzafi, ainsi que trois autres meneurs, Nabil Ahmjiq, Ouassim Boustati et Samir Ighid, ont écopé de 20 ans de prison, peine la plus lourde prononcée lors de ce procès, pour«complot visant à porter atteinte à la sécurité de l’Etat», un chef d’accusation passible, selon les textes, de la peine de mort.

Les 49 autres militants qui comparaissaient avec eux ont écopé de peines comprises entre un et quinze ans de prison. «Ce sont des peines très lourdes. L’Etat a échoué dans ce test de respect des droits de l’homme et des libertés essentielles, tout comme l’indépendance de la justice», a déclaré l’un des avocats de la défense, Souad Brahma.

Les avocats, qui ont refusé de plaider par solidarité avec la protestation des prévenus contre la «partialité de la justice», ont l’intention de faire appel après concertation avec leurs clients. Les détenus ont boycotté les derniers jours d’audience et refusé de prendre la parole aux dernières heures du procès. Le cas du journaliste Hamid Al Mahdaoui, poursuivi pour «non-dénonciation d’une tentative de nuire à la sécurité intérieure de l’Etat» et jugé en même temps que les 53 militants du Hirak, sera traité séparément aujourd’hui.

Il risque, selon Reporters sans frontières (RSF), deux à cinq ans de prison ferme. Il est le seul à n’avoir pas boycotté les audiences. Les manifestations déclenchées au Rif, au nord du Maroc, par la mort d’un vendeur de poissons, Mouhcen Fikri, broyé dans une benne à ordures en octobre 2016, ont été durement réprimées par le palais royal.

Environ 450 personnes, selon des associations, ont été arrêtées pendant les manifestations généralement pacifiques, mais parfois marquées par des heurts entre forces de l’ordre et protestataires. L’«approche sécuritaire» des autorités a été critiquée par des associations de défense des droits de l’homme, qui ont dénoncé la «répression» du mouvement et des actes de «torture» contre certains manifestants après leur arrestation.

Indignation

Le verdict prononcé à l’encontre des détenus du Rif a suscité hier une vague d’indignation au Maroc. Il s’agit d’un «simulacre de justice», a tweeté l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH), alors que quelques médias marocains relevaient la «sévérité» des peines.

«Les décisions désastreuses de l’Etat menacent la stabilité et la cohésion du pays», a déclaré Nabila Mounib, figure de la gauche au Maroc à la tête du PSU (Parti socialiste unifié, gauche), lors d’une conférence consacrée à la contestation sociale dans le pays et aux détentions politiques, hier à Casablanca. Dans la nuit de mardi à mercredi, des rassemblements ont eu lieu à Al Hoceïma, épicentre du Hirak (la mouvance), et dans la ville voisine d’Imzouren, autre haut lieu de la protestation, ont rapporté des médias locaux.

Des appels à la grève générale circulent sur les réseaux sociaux, avec des images de commerces fermés. Sur les réseaux sociaux, des milliers d’internautes ont remplacé leur photo de profil par un fond noir, avec des commentaires sur la «honte» qu’ils disent ressentir devant cette «injustice», en comparant les peines avec celles plus «clémentes» prononcées contre les «pédophiles» et les «criminels».

Des internautes marocains ont évoqué un «retour en arrière» vers «les années de plomb» marquées par les exactions commises sous le règne de l’ancien roi Hassan II entre les années 1960 et 1990. Des appels à manifester ont été lancés sur les réseaux sociaux, à Casablanca, Rabat, mais aussi à Bruxelles, Paris et Madrid, qui accueillent une importante diaspora marocaine.

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