
Maglor - Lille – juin 2025. Le lycée musulman Averroès, figure emblématique de l’enseignement privé sous contrat en France, revient au cœur de l’actualité après des mois de tourmente. Ce dossier met en lumière la question des financements étrangers, notamment en provenance du Qatar, et leur encadrement depuis la loi contre le séparatisme adoptée en 2021.
Un établissement sous tension, entre excellence et soupçons
Fondé en 2003 à Lille et sous contrat avec l’État depuis 2008, le lycée Averroès s’est imposé comme l’un des établissements les plus performants de la région, affichant régulièrement d’excellents résultats au baccalauréat. Mais en 2020, la publication du livre Qatar Papers des journalistes Georges Malbrunot et Christian Chesnot a jeté une ombre sur sa réputation : les auteurs y révèlent que l’établissement a reçu près d’un million d’euros de la part de la Qatar Charity, une ONG soupçonnée par plusieurs pays de promouvoir une influence religieuse.
Ce financement, s’il n’a jamais été déclaré illégal, a suffi à semer le doute. En 2019, la région Hauts-de-France, présidée par Xavier Bertrand, a cessé son soutien financier à l’établissement. En décembre 2023, la préfecture du Nord a décidé de mettre fin au contrat d’association liant le lycée à l’État, invoquant des « manquements aux valeurs républicaines ».
Une justice indépendante et des élèves mobilisés
Face à cette décision, les responsables de l’établissement ont saisi le tribunal administratif de Lille. Après des mois d’audiences et de débats, la justice a tranché en avril 2025 : le contrat est rétabli. Le tribunal a estimé que les accusations portées contre le lycée n’étaient pas suffisamment étayées pour justifier la rupture du contrat.
Les enseignants, les parents d’élèves et les anciens élèves ont salué cette décision comme une victoire de la justice et de la raison. Pour eux, le lycée Averroès est avant tout un lieu d’excellence éducative, d’émancipation sociale et de respect de la laïcité.
🇶🇦 Une question de soft power sous haute surveillance
Depuis plusieurs années, le Qatar a été un acteur majeur du financement d’associations et de lieux éducatifs en Europe, suscitant à la fois intérêt et inquiétude. En France, la loi contre le séparatisme (2021) impose désormais une déclaration obligatoire des financements étrangers et un contrôle renforcé des projets éducatifs.
Le cas Averroès pose une question centrale : jusqu’où peut-on accepter un financement étranger lorsqu’il s’inscrit dans une logique éducative et non prosélyte ? Et plus largement, comment articuler ouverture à l’international, autonomie associative et respect des principes de la République ?
Un enjeu qui concerne aussi les Marocains du Monde
Pour Maglor.fr, ce débat trouve un écho particulier auprès des Marocains Résidant à l’Étranger (MRE), nombreux à être impliqués dans la gestion ou le soutien d’associations éducatives, culturelles ou cultuelles. Il rappelle l'importance d’un ancrage républicain fort, mais aussi la nécessité de ne pas stigmatiser des initiatives dont la finalité est souvent éducative, intégrative et sociale.
Conclusion
L’affaire Averroès n’est pas seulement un débat sur un financement venu du Golfe. Elle est le reflet des tensions qui traversent la société française, entre méfiance sécuritaire et exigence d’égalité des chances. Elle souligne aussi le besoin d’une lecture apaisée et rigoureuse des enjeux liés à l’éducation et à la diversité culturelle.