Il n’y a aucune preuve qu’il existe un lien entre l’immigration et le terrorisme. Malgré l’absence démontrée de liens, le discours «sécuritaire» domine largement les discussions politiques autour de l’immigration. Les nombreuses mesures répressives en vogue présentement dans presque tous les pays du monde sont toujours justifiées par l’argument de la sécurité nationale.
Généralement, les analyses suggèrent que le discours sécuritaire en matière d’immigration a pris de l’ampleur à partir du 11 septembre 2001 avec les attentats du World Center. S’il est vrai que ces attentats ont exacerbé le discours sur la menace terroriste liée à la migration, il n’en demeure pas moins que l’approche de la sécurité nationale en matière de migration était présente bien avant.
Par exemple, au Canada, l’adoption d’une vision sécuritaire dans la gestion des mouvements migratoires de masse est réaffirmée à plusieurs reprises dès le début des années 1990. Les termes utilisés par Barbara McDougall, ministre des Affaires étrangères du Canada de 1991 à 1993, ne laissent aucun doute sur la nécessité pour le Canada d’être plus «agressif et actif» dans la lutte contre les menaces transnationales à la sécurité telles que le terrorisme et les migrations internationales de masse (Phillipe Bourbeau, 2013).
Un rapport récent publié par la Maison-Blanche a tenté de démontrer que ce lien existe mais le rapport a été très critiqué au point de le rendre non crédible. Selon l’article de Julie Hirschfeld Davis et Ron Nixon (New York Times, 16 janvier 2018), les statistiques utilisées incluent des cas non pertinents (ex. : personnes extradées aux États-Unis pour subir un procès pour des attentats commis à l’extérieur) tout en omettant les cas d’attentats «domestiques» commis par exemple par des groupes comme les «suprémacistes blancs». De plus, les conclusions présentées dans ce rapport vont à l’encontre des études scientifiques sur la menace sécuritaire qui ne montrent aucun lien probant entre la migration et le terrorisme.
Une des études les plus fouillées a été réalisée aux États-Unis sur des attentats commis entre 1975 et 2015. Durant cette période, la probabilité pour un Américain d’être tué par un terroriste né à l’étranger était de 1 sur 3,6 millions et celle d’être tué par un attentat commis par un réfugié était de 1 sur 3,5 milliards. Le risque annuel d’être tué par une personne autre qu’un terroriste né à l’étranger était de 253 fois plus grand que celui d’être tué par un terroriste étranger.
L’autre mythe que véhicule les liens supposés entre immigration et terrorisme implique que la menace vient de l’extérieur. Or, il s’agit là encore d’un faux lien. Dans la plupart des cas, les attentats sont commis par des ressortissants nationaux qui se sont radicalisés sur place. C’est par exemple le cas des attentats récents perpétrés en France (ex. : Charlie Hebdo, Bataclan) dont les responsables étaient des ressortissants français qui étaient bien connus des policiers et des services de renseignements. Nous sommes donc ici en présence d’une menace interne provenant de la radicalisation.
Par Victor Piché