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Les Tunisiens au rendez-vous de ramadan, malgré les temps difficiles

Si une partie de la population tunisienne ne parvient pas à s’en sortir, en particulier pendant le ramadan, une autre partie laisse s’exprimer pendant le mois saint son péché majeur : la surconsommation.

(Arab News) - En Tunisie, confrontée à une instabilité chronique depuis la chute du régime de Zine el-Abidine ben Ali, le 14 janvier 2011, les ramadans se suivent et ne se ressemblent pas. Cette année, le rite sacré, auquel les Tunisiens ont commencé à participer, diffère de tous ceux qui ont précédé. Jamais le mois saint ne s’est déroulé dans un contexte aussi difficile qu’aujourd’hui : crise politique, économique, financière…

Mais qu’il vente ou qu’il pleuve, les Tunisiens ne sont jamais indifférents à l’arrivée de ramadan. Et certains l’attendent et s’y préparent avec beaucoup plus de ferveur que d’autres.

Dans la première catégorie, on trouve les musulmans pratiquants, et dans la seconde, la frange de la population attachée à son islamité et, partant, au rituel ramadanesque, plus par tradition et appartenance culturelle. 

Le 23 mars 2023, premier jour de ramadan en Tunisie, dans le centre de Tunis, la capitale. Dans une rue secondaire, à une centaine de mètres de l’avenue Habib Bourguiba, principale artère de la capitale, une centaine de personnes font la queue dans l’espoir de décrocher le Graal : un sachet de sucre, difficile à trouver depuis près d’une année, comme tant d’autres denrées, en raison d’une pénurie chronique.

Conscient du fait que les Tunisiens n’accepteront jamais de ne pas pouvoir remplir leur caddie, le gouvernement s’est mobilisé depuis près d’un mois pour qu’ils puissent le faire et dans les meilleures conditions, au moins pendant le ramadan.

En dépit des crises multiples et simultanées dans lesquelles le pays se débat, les Tunisiens observent le rituel saint avec un mélange de piété et de boulimie consommatrice.

Ainsi, les autorités ont pris des dispositions pour garantir l’approvisionnement, notamment en surveillant de plus près les circuits de distribution ; et elles ont imposé le plafonnement des prix de certaines denrées pour réduire un peu l’impact de l’inflation (qui, avec un taux de 10,4% en février 2023, a atteint son plus haut niveau depuis quarante ans). 

Les autorités ont également alloué près de 40 millions de dinars (1 dinar tunisien = 0,30 euro) à un programme d’aides – financières et en nature – à près de trois cent vingt familles dans le besoin et décidé de mettre en place quarante-huit tables pour la rupture du jeûne destinées à ceux qui n’auraient pas accès aux aides.

Paradoxe tunisien, si une partie de la population ne parvient pas à s’en sortir, en particulier pendant le ramadan, une autre partie laisse s’exprimer pendant le mois saint son péché majeur : la surconsommation, qui a pour corollaire le gaspillage. Comme tous les ans, l’Institut national de la consommation (INC) – qui a dévoilé en 2021 que la consommation de certains produits augmentait de 100 à 150% durant le ramadan – a rappelé aux Tunisiens le 26 mars que près de 66% des mets finissaient à la poubelle.

Mais le ramadan, c’est aussi – surtout – le mois de la piété et de la convivialité. Après la rupture du jeûne, en famille, les plus pieux des Tunisiens se hâtent d’aller à la mosquée pour les tarawih, des prières qui s’ajoutent, durant le ramadan, aux cinq quotidiennes et qui durent d’une à deux heures, selon l’abnégation de chacun. Les autres mettent le cap sur le café pour jouer aux cartes avec les amis, parfois en se gavant de pâtisseries traditionnelles. Jusqu’à l’heure du suhur, dernier repas de la journée avant le début du jeûne.

Moncef Mahroug

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