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Normalisation avec Israël : « pas à l'ordre du jour » en Tunisie

En visite officielle en France, lundi 14 décembre, le Premier ministre tunisien, Hichem Mechichi, a marqué sa différence d'avec le voisin marocain.

(AFP) - Sous l'égide de l'administration du président américain Donald Trump, quatre pays arabes – Émirats arabes unis, Bahreïn, Soudan, puis Maroc jeudi dernier – ont établi ces derniers mois des relations diplomatiques avec l'État hébreu. Qu'en est-il de la Tunisie ? Hichem Mechichi, le Premier ministre a tenu à préciser le choix de son pays. Le chef du gouvernement tunisien a affirmé que la normalisation des relations entre son pays et Israël n'était « pas une question à l'ordre du jour », quelques jours après qu'une telle décision a été prise par son voisin marocain.

« C'est un choix pour lequel le Maroc a opté librement. Nous respectons le choix du Maroc, le Maroc est un pays frère, un pays que nous aimons beaucoup. Pour la Tunisie, ce n'est pas une question à l'ordre du jour », a-t-il déclaré dans une interview sur la chaîne française France 24, lundi soir. « Chaque pays a sa réalité, sa vérité, et chaque pays a sa diplomatie qu'il considère être la meilleure pour son peuple », a-t-il poursuivi, indiquant qu'il n'avait pas été approché par l'administration américaine en ce sens.

« Pas le choix de la Tunisie »

Jeudi dernier, le président américain sortant Donald Trump avait annoncé l'engagement du Maroc à normaliser ses relations avec Israël et la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté marocaine sur le territoire disputé du Sahara occidental. Après les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Soudan, le Maroc est le quatrième pays arabe depuis août à promettre une normalisation des relations avec l'État hébreu.

u Maghreb, cette décision du Maroc a fait quelques remous, à l'image de l'Algérie qui a dénoncé des « manœuvres étrangères » visant à la déstabiliser. La question du Sahara occidental, qui partage un bout de frontière avec l'Algérie, empoisonne les relations algéro-marocaines depuis plus de 40 ans. L'ancienne colonie espagnole est à la fois revendiquée par les Marocains et les indépendantistes du Front Polisario soutenus par l'Algérie. Des négociations pilotées par l'ONU sont au point mort depuis le printemps 2019. Cette brouille entrave notamment la mise en œuvre de l'Union du Maghreb arabe (UMA) et représente un coût économique estimé par des experts internationaux à plusieurs points de PIB.

Priorité à la crise migratoire

Au-delà de cette question d'actualité brûlante, Jean Castex et Hichem Mechichi, à la tête d'un gouvernement de technocrates, ont abordé ensemble d'importants dossiers clés pour la coopération entre les deux pays dans le contexte de la commémoration du dixième anniversaire de la révolution de 2011. Dix ans après la révolution et le départ de Ben Ali, la Tunisie peine à trouver une stabilité politique. Sans compter que la menace islamiste est toujours aussi forte. Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur, est venu récemment à Tunis pour négocier le retour des ressortissants radicalisés et en situation irrégulière. Comme l'avaient annoncé les services des deux Premiers ministres, la veille « cette visite s'inscrit dans le contexte de la solidarité marquée par la Tunisie à l'égard de la France à la suite de l'attentat de Nice », soulignent les services du Premier ministre dans un communiqué. Brahim Aouissaoui, qui a tué au couteau trois personnes dans la basilique de Nice le 29 octobre, est un Tunisien de 21 ans.

La question migratoire est au cœur des préoccupations de chaque côté de la Méditerranée. Hichem Mechichi a souligné « la nécessité d'une approche concertée entre les deux pays, basée sur le développement solidaire et l'investissement dans les régions exportatrices de migrants irréguliers », rapporte l'agence de presse tunisienne, TAP.

Le chef du gouvernement d'ajouter que « la France s'est montrée convaincue que l'approche sécuritaire est utile, mais insuffisante dans le traitement de la question migratoire » et que cet aspect sera approfondi entre les deux pays. « La Tunisie est un partenaire prioritaire pour la France et la relation franco-tunisienne est unique », insiste-t-on du côté de Paris. Emmanuel Macron avait reçu en juin dernier le président tunisien Kaïs Saïed, lui annonçant une enveloppe de 350 millions d'euros de prêts. Aujourd'hui, Hichem Mechichi évalue les besoins de son pays à 5 milliards d'euros pour combler son déficit.

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