Maglor- La corruption reste un obstacle majeur au développement économique du Maroc, malgré les initiatives visant à éradiquer ce fléau. En 2018, dans le cadre des réformes entreprises pour renforcer la transparence et la bonne gouvernance, le Roi Mohammed VI a nommé Mohamed Bachir Rachdi à la tête de l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPPLC). Cependant, six ans après cette nomination, les résultats escomptés se font attendre.
Un recule inquiétant dans les classements mondiaux
Selon le rapport annuel de Transparency International, le Maroc a chuté dans les classements mondiaux en matière de perception de la corruption. En effet, le pays est passé du 83ème rang en 2018 au 97ème en 2023, un signe que les efforts de lutte contre la corruption peinent à porter leurs fruits. Cette régression peut s'expliquer par divers facteurs, dont l'impact de la pandémie de Covid-19, qui a ralenti les réformes dans de nombreux secteurs.
Augmentation des ressources, mais des résultats limités
L'INPPLC a vu son budget croître de manière significative, passant de 25 millions de dirhams à environ 200 millions de dirhams. L'effectif de l'instance a également été renforcé, avec 105 employés en 2023. Cependant, cette augmentation des moyens n'a pas encore produit d'effets tangibles sur la réduction de la corruption dans le pays.
Une des critiques majeures formulées à l’encontre de l’INPPLC est son approche sectorielle, qui fonctionne de manière isolée, ou en "silos". Cette méthode, jugée peu efficace, limite les synergies entre les différents secteurs. Pour atteindre des résultats concrets, une approche globale et coordonnée est nécessaire, couvrant des thématiques clés telles que la déclaration du patrimoine, la lutte contre l’enrichissement illicite, la moralisation de la vie publique, et la simplification des procédures administratives.
Les premiers résultats dans le secteur financier
Malgré ces défis, des progrès ont été réalisés dans certains secteurs. Depuis 2019, l'INPPLC a lancé une initiative pilote dans le secteur financier, en collaboration avec Bank Al-Maghrib, l'Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), et l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS). Cette initiative a permis de sensibiliser plus de 1 700 hauts responsables d’établissements financiers et de cartographier les risques de corruption dans le secteur bancaire. Ces actions sont aujourd'hui en phase finale, avec l'établissement de guides de mise en place de systèmes anticorruption dans ces institutions.
Un tournant nécessaire vers une approche holistique
L’expérience du secteur financier montre que la lutte contre la corruption nécessite une approche concertée et intersectorielle. Il devient donc urgent pour l’INPPLC de sortir de son cadre sectoriel et d’adopter une vision globale. Cela inclut des actions renforcées dans le secteur privé, la société civile, ainsi que la simplification des procédures administratives, afin de créer un environnement plus transparent et plus efficace.
Une course contre la montre
Le Maroc se trouve à un moment décisif dans sa lutte contre la corruption. Plus le temps passe, plus les pratiques corruptives se complexifient, rendant leur éradication plus difficile. C’est pourquoi l’INPPLC doit accélérer ses efforts pour réformer les structures en place et améliorer la transparence dans tous les secteurs de la société.