
Brahim Saadoun, le jeune prisonnier de guerre marocain libéré dans le cadre d'un échange entre Moscou et l'Ukraine, a dit vouloir "attirer l'attention sur la situation difficile en Ukraine et la lutte de son peuple", à son retour au Maroc samedi soir.
(AFP) - "Je suis heureux de rentrer à la maison après être passé par des moments très difficiles ", a déclaré l'étudiant de 21 ans dans une interview à l'AFP, au domicile de ses parents dans un quartier populaire de Casablanca.
"Je veux attirer l'attention sur la situation difficile en Ukraine et la lutte de son peuple en cette période douloureuse", a-t-il plaidé.
Cet étudiant ingénieur en aéronautique, établi en Ukraine depuis 2019, a recouvré la liberté mercredi avec neuf autres prisonniers de guerre étrangers -- dont cinq Britanniques et deux Américains -- dans le cadre d'un échange entre Moscou et Kiev favorisé par une médiation saoudienne.
Le jeune homme, qui est apparu souriant et en bonne santé aux côtés de sa mère, a remercié l'Arabie saoudite, le gouvernement turc ainsi que le peuple marocain "qui s'est solidarisé avec nous".
Evoquant "un sentiment de joie indescriptible", le père de Brahim Saadoun a également salué le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane pour son rôle dans la libération de son fils.
Brahim "a souffert de l’emprisonnement mais il va se rétablir et se remettre à ses études", a-t-il expliqué à l'AFP.
Brahim Saadoun, qui a combattu dans l'armée ukrainienne, avait été condamné à mort le 9 juin dernier pour mercenariat par les autorités séparatistes prorusses à Donetsk (est de l'Ukraine). Il avait été capturé aux côté de deux Britanniques, Aiden Aslin et Shaun Pinner, également accusé des mercenariat.
Après le procès du jeune homme, le gouvernement marocain avait précisé que Brahim Saadoun "a été capturé portant l'uniforme de l'armée de l'Etat d'Ukraine" et qu'"il se trouve actuellement emprisonné par une entité qui n'est reconnue ni par les Nations unies ni par le Maroc".
Le Maroc a adopté à l'ONU une position de neutralité dans la guerre entre la Russie et l'Ukraine. Cette neutralité manifeste la volonté de Rabat de ne pas s'aliéner la Russie, membre du Conseil de sécurité de l'ONU, sur la question du territoire disputé du Sahara occidental, priorité de la diplomatie marocaine.
Le jeune étudiant marocain en Ukraine, condamné à mort par un tribunal séparatiste pro-russe en juin 2022, a bénéficié d’un échange de prisonniers entre Kiev et Moscou grâce à une médiation de l’Arabie saoudite.
Un avion avec à son bord Brahim Saâdoun, ainsi que cinq Britanniques, deux Américains, un Suédois et un Croate a atterri en Arabie saoudite, dans la soirée du mercredi, après l’intervention du prince-héritier saoudien Mohammed ben Salman, qui a abouti à un échange de prisonniers entre la Russie et l’Ukraine, a annoncé le ministère des Affaires étrangères à Riyad. Les autorités saoudiennes ont transféré les prisonniers de Russie vers l’Arabie saoudite, et oeuvraient encore, au lendemain de leur libération, à faciliter les procédures de leur rapatriement en sécurité dans leurs pays respectifs. Alors que les pays d’origine des neuf autres prisonniers libérés ont officiellement réagi à cet échange, par la voie de très hauts responsables comme la première ministre britannique, Liz Truss, ou le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, les autorités marocaines restaient discrètes.
Des pressions énormes
Contacté par Maroc Hebdo, Tahar Saâdoun, père de Brahim, a tenu à “remercier” le prince ben Salman qui, selon plusieurs sources médiatiques, a mené les négociations avec les parties ukrainienne et russe pour arriver à une solution à ce dossier. “Je ne remercierais jamais assez sa majesté Mohammed VI, qui nous a entourés de sa haute sollicitude, et je vous remercie, vous les journalistes, d’avoir suivi cette affaire et de l’avoir médiatisée en défendant l’innocence de mon fils”, nous a-t-il confié, avec autant de joie que d’émotion. Tahar Saâdoun a noté que son fils a été soumis, pendant ses 6 mois détention, à des pressions énormes de la part de ses geôliers, et qu’il devra subir un ensemble d’analyses et de contrôles médicaux en Arabie saoudite, pour évaluer son état physique et psychique.
Né à Meknès en 2001, Brahim Saâdoun, fils d’un gendarme, est parti en Ukraine en 2017 pour étudier à l’université d’aéronautique et de sciences aérospatiales de Kiev. À l’été 2020, il intègre la marine ukrainienne et obtient la nationalité de son pays d’accueil. Moins d’un an plus tard, alors que les forces russes lancent, le 24 février, leur attaque sur l’Ukraine, Brahim Saâdoun est envoyé au front, pour “combattre”, selon les séparatistes soutenus par Moscou. Le jeune étudiant finit par se faire arrêter, le 12 mars à Marioupol, dans la région de Donetsk, par les combattants séparatistes pro-russes, alors qu’il portait l’uniforme de l’armée de Kiev. Il sera par la suite condamné à mort pour mercenariat, le 9 juin, déclenchant une immense vague de réactions au Maroc mais aussi à l’international.