Maglor - Deux ans après la rupture diplomatique entre le Royaume du Maroc et la République tunisienne, causée par l'accueil controversé du leader du Front Polisario, Brahim Ghali, par le président Kaïs Saïed, un premier signe de rapprochement semble émerger. Le ministre des Affaires étrangères marocain, Nasser Bourita, a rencontré son homologue tunisien, Mohamed Ali Nafti, à Pékin, en marge du Forum de coopération économique sino-africain (FOCAC).
Cette rencontre, immortalisée par une photo diffusée sur le compte officiel du ministère tunisien des Affaires étrangères sur la plateforme X (anciennement Twitter), intervient à un moment crucial pour les relations bilatérales entre les deux pays. Alors que la rupture diplomatique dure depuis août 2022, l'événement suscite des interrogations sur une éventuelle reprise du dialogue et la normalisation des relations entre Rabat et Tunis.
Un premier contact officiel
Ce rapprochement suit un premier contact officiel, intervenu une semaine plus tôt, lorsqu'un appel téléphonique entre Nasser Bourita et Mohamed Ali Nafti a marqué la reprise des échanges diplomatiques. Lors de cet entretien, le ministre marocain a félicité son homologue tunisien pour sa récente nomination, et les deux diplomates ont réaffirmé « la profondeur des liens fraternels » entre les deux nations.
Si certains analystes voient dans cette série d'événements le signe d'une détente imminente, d'autres considèrent qu'il s'agit avant tout de gestes diplomatiques de courtoisie, dictés par les relations historiques et culturelles entre le Maroc et la Tunisie.
Des signes d’ouverture avant les élections
Pour Rachid Lazraq, analyste politique, ces échanges officiels représentent des « signes rassurants » d’une possible fin de la rupture diplomatique. Il souligne que cette réconciliation pourrait être facilitée par la tenue des élections présidentielles en Tunisie, prévues en octobre prochain.
Lazraq estime que la nomination de Mohamed Ali Nafti comme ministre des Affaires étrangères traduit une volonté de Kaïs Saïed de réorienter la politique extérieure tunisienne, dans un contexte géopolitique régional marqué par de profonds bouleversements. Cependant, il précise que la concrétisation de ce rapprochement dépendra en grande partie des résultats des élections et des futures orientations politiques de Tunis.
Les erreurs du passé
Khalid Cheyat, professeur de relations internationales à l’Université Mohammed Ier d’Oujda, reste plus prudent. Selon lui, la rencontre à Pékin et l'appel téléphonique entre les deux ministres relèvent surtout de la « courtoisie diplomatique ». Il rappelle que l'accueil par Kaïs Saïed de Brahim Ghali, leader du Front Polisario, en août 2022, avait profondément choqué Rabat, qui attendait de la Tunisie qu'elle maintienne sa neutralité sur la question du Sahara.
Pour Cheyat, la réconciliation entre les deux pays ne pourra se concrétiser qu'à condition que la Tunisie adopte une position claire sur cette question cruciale pour le Maroc. « La question du Sahara marocain est le prisme à travers lequel le Maroc évalue ses amitiés », a souligné le professeur, faisant écho aux propos du roi Mohammed VI.
Un avenir incertain
Alors que les observateurs suivent de près ces premiers gestes de rapprochement, beaucoup s’interrogent sur la suite. La Tunisie prendra-t-elle des mesures concrètes pour corriger l’erreur de l’accueil de Brahim Ghali ? Les prochaines semaines seront déterminantes pour savoir si ce dialogue diplomatique amorcé à Pékin ouvrira la voie à une véritable réconciliation, ou s'il restera une simple formalité dictée par les circonstances.
En attendant, le retour à des relations bilatérales normales reste suspendu à des évolutions politiques et diplomatiques cruciales, dans une région marquée par de profondes transformations géopolitiques.