Partager sur :

Relations France-Maghreb : Entre incertitudes et défis, une relation complexe

Maglor - La relation entre la France et la région du Maghreb a toujours été complexe et multiforme, caractérisée par un mélange de liens historiques, de connexions culturelles, d'interdépendance économique et de dynamique géopolitique. Cependant, ces dernières années, cette relation est entrée dans une ère d'incertitude, marquée par divers défis et des dynamiques changeantes.

L'un des principaux facteurs contribuant à cette incertitude est l'évolution du paysage politique en France et dans les pays du Maghreb. En France, les changements politiques internes et la montée des mouvements populistes ont eu un impact sur la politique étrangère du pays et son approche du Maghreb. Cela a conduit à une attitude plus prudente et plus introvertie, ainsi qu'à une plus grande insistance sur les intérêts nationaux.

De même, la région du Maghreb a connu d'importantes transformations politiques, notamment les conséquences du printemps arabe et le processus de consolidation démocratique en cours. Ces changements ont entraîné de nouveaux gouvernements, des idéologies politiques et une dynamique de pouvoir dans la région, ce qui rend difficile pour la France de naviguer dans ses relations et d'établir des partenariats stables.

le Maghreb traverse une période difficile, marquée par des crises politiques et des défis économiques majeurs. En Libye, la lutte pour le pouvoir et les rivalités internes ont plongé le pays dans une situation de chaos, avec des conséquences déstabilisatrices pour toute la région. En Tunisie, l'érosion de la démocratie et la fragilité des institutions ont suscité des inquiétudes quant à l'avenir du pays et ont terni l'image de la transition démocratique.

De plus, les relations entre l'Algérie et le Maroc ont connu une dégradation notable, avec des tensions persistantes autour de questions politiques et territoriales. Ces conflits entravent la coopération régionale et entraînent un climat d'incertitude quant à la stabilité future de la région.

Il est crucial que la diplomatie française agisse avec prudence et prévoyance dans cette période d'incertitude. L'Élysée doit adopter une approche stratégique, basée sur le dialogue, la coopération et le respect mutuel. En renforçant les liens économiques, culturels et politiques avec le Maghreb, la France peut contribuer à la résolution des crises et à la promotion de la stabilité régionale.

France-Algérie : entre rapprochements et controverses, une relation fragile

Depuis son entrée en fonction en 2017, Emmanuel Macron a caractérisé une volonté ferme de réchauffer les relations entre la France et l'Algérie. Cependant, ce rapprochement reste fragile et parsemé d'obstacles, comme en témoigne récemment plusieurs controverses. La question de l'immigration continue de peser sur le lien bilatéral. À la fin du mois de mai dernier, le spectre d'une abrogation unilatérale de l'accord franco-algérien de 1968 sur l'immigration a fait surface, suscitant des craintes d'une grave crise et étant perçu au-delà de la Méditerranée comme un geste intentionnel visant à priver les Algériens de leurs privilèges en France.

La réaction algérienne, particulièrement vive, s’est manifestée avant une prise de décision officielle qui s’est positionnée contre les conclusions de la note de la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol) sur cet accord franco-algérien. Ce dernier régit l'entrée et le séjour des Algériens en France. Les rapports entre Paris et Alger sont souvent traversés par divers faits et nourris par différents signes de tensions. Des deux côtés, en effet, il y a des partisans de la normalisation, et les réticents. De surcroît, les interlocuteurs français remarquent qu’une «ligne dure» antifrançaise joue la surenchère à Alger et plaide pour un «rapprochement avec la Russie afin de contrer la France en Afrique».

En février dernier, le rapatriement en France à partir de la Tunisie de l’activiste franco-algérienne Amira Bouraoui a provoqué un incident diplomatique lorsqu’Alger a fustigé une «exfiltration illégale» et a rappelé son ambassadeur. Cette brouille a été probablement l’une des causes du report de la visite du président algérien, Abdelmadjid Tebboune, initialement prévue les 2 et 3 mai, vers la deuxième moitié du mois de juin.

Cependant, malgré les efforts destinés à aplanir la question mémorielle avec la commission mixte des deux parties, il ne faut pas exclure le fait que les mesures françaises pour restreindre l’immigration pourraient reporter ou perturber la visite présidentielle algérienne.

La tâche du président Macron n’est pas aisée, car les mesures qu’il annonce sont accueillies par un sentiment d’incompréhension. En outre, les liens entre Paris et Rabat restent intimement liés à la politique de Paris envers l'Algérie, ce qui exige une approche globale et équilibrée.

Les griefs de Rabat à l’encontre de Paris

D’un point de vue historique, le partenariat franco-marocain a résisté à de nombreuses épreuves. Toutefois, la tension qui marque depuis 2020 les liens entre Paris et Rabat ne pourrait guère être plus vive.

Même si l’entourage de l’Élysée refuse de parler d'une crise diplomatique avec le Maroc, les relations entre les deux pays sont très dégradées. Il est certain que la question épineuse des visas n’est pas la principale cause d’une escalade d’une telle ampleur qu’elle a provoqué le report de la visite officielle d'Emmanuel Macron au Maroc. Tout indique que la position française à l’égard du Sahara occidental et de l’amélioration des liens entre Paris et Alger sont les principales raisons du mécontentement marocain. 

Ces liens franco-marocains, déjà tendus, ont été violemment ébranlés par le problème des visas. En effet, pendant l'automne 2021, la France avait annoncé sa volonté de réduire de manière drastique le nombre de visas accordés aux voyageurs marocains (ce dernier a été divisé par deux, comme celui des Algériens ; dans le même temps, celui des Tunisiens a baissé d'un tiers). C’est là pour Paris une manière d’accentuer la pression sur ces trois pays réticents à accueillir leurs ressortissants en situation irrégulière et visés par des expulsions du territoire français. Pour le Maroc, il s’agit d’une forme de «chantage» inacceptable et un frein à la libre circulation. Cette question de flux migratoires demeure la pomme de la discorde en dépit de la visite de la ministre française Catherine Colonna en décembre 2022.

Pour le moment, l’entourage du roi marocain attribue à la France la responsabilité de la dégradation du lien bilatéral au «positionnement proalgérien de l’Élysée»!

La France, accusée de jouer «la carte algérienne», ne parvient pourtant pas non plus à ouvrir un nouveau chapitre serein avec Alger, en réalité. Et les relations françaises avec la Tunisie et la Libye ne sont pas meilleures.

Bien que l’Hexagone plaide contre l’effondrement économique de la Tunisie (en matière d’aide économique pour maîtriser les flux migratoires), une position que la France partage avec l’Italie, ni le pouvoir tunisien ni les oppositions et les démocrates n’apprécient cette position française très prudente – celle d’une ancienne puissance coloniale qui se trouve fragilisée au Maghreb, et plus largement en Afrique francophone.

Partager sur :