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Dans le souk de Marrakech, « depuis la fermeture des frontières, il n’y a personne »

Le fermeture des frontières marocaines empêche les MRE de rentrer au pays pour y passer quelques jours et se ressourcer. Mais c'est aussi une catastrophe pour le commerce local. Un reportage d'Aurélie Collas, envoyée spéciale du quotidien Le Monde, à Marrakech le montre.

(Le Monde) - Les commerçants du village artisanal jouxtant la place Djemaa El-Fna se demandent s’ils doivent rester ouverts, certains ayant perdu 90 % de leurs revenus. Pour eux, la solution est d’écouler leurs produits sur les plates-formes de vente en ligne. Un défi pour ce secteur traditionnel.

Les échoppes sont désertes et certains rideaux fermés. Dans les ateliers, les machines sont à l’arrêt, et les tapis, poteries, vanneries exposés sur les étals prennent la poussière. En ce samedi de janvier, le silence et le vide règnent dans l’ensemble artisanal de Marrakech – un espace de production et de vente consacré à l’artisanat marocain situé à proximité de la place Djemaa El-Fna et de la mosquée Koutoubia. « Depuis le Covid-19, le commerce, ça ne marche pas », résume, amer, Mohammed Essaouissi, un graveur-ciseleur, qui expose dans sa boutique toutes sortes d’objets en cuivre, fruit d’un savoir-faire ancestral. « La plupart des artisans sont foutus. Ils souffrent, et personne ne pense à eux. »

Dans ce haut lieu de la culture traditionnelle, le secteur, étroitement lié au tourisme, se trouve quasiment à l’arrêt. L’automne 2021, pourtant, avait marqué les prémices d’une reprise dans la « ville rouge », jusqu’à ce que les autorités décrètent, le 29 novembre, la suspension de tous les vols de passagers au départ et à destination du royaume chérifien – et ce, jusqu’au 31 janvier 2022 au minimum –, en raison de la propagation rapide du variant Omicron du SARS-CoV-2 dans le monde. Pour les artisans, qui, depuis deux ans, subissent de plein fouet les conséquences de la pandémie, cette décision a été perçue comme le coup de grâce.

« On attendait les touristes étrangers, notamment les Français qui sont nombreux à venir passer les fêtes de fin d’année ici. Mais ils ne sont pas venus. Depuis la fermeture des frontières, il n’y a personne », se désespère Mohammed Essaouissi. Rien ne laisse présager un rebond rapide de l’activité touristique, d’autant que le Maroc connaît une courbe exponentielle du nombre de contaminations et s’approche du pic de la vague Omicron, attendu pour la deuxième quinzaine de janvier.

Dans l’ensemble artisanal de Marrakech, des artisans ont fermé boutique, à l’instar de Yacine Maroudi, un fabricant de babouches. Lui vient deux ou trois fois par semaine « pour voir des amis » et « passer le temps ». « Mais à quoi bon ouvrir, à part dépenser de l’électricité pour rien ? Il n’y a pas de clients ! » Après dix-sept ans de métier, le maroquinier cherche un nouveau travail : « N’importe quel job sérieux. » Certains ont déjà vendu leurs outils et se sont reconvertis. D’autres restent chez eux, parce qu’ils n’ont même plus de quoi payer le transport. D’autres encore ont plongé. « Hier, j’ai vu un artisan qui demandait de l’argent dans la rue. Ça fait mal au cœur, vous savez », confie Mohammed Ihsan Ghouat, un menuisier d’art.

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