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Service militaire : Marocains résidant à l'étranger, êtes vous (aussi) concernés ?

L’inquiétude grandit dans la communauté marocaine de l'étranger. Le Maroc décide la semaine prochaine de rétablir dès 2019 le service militaire obligatoire pour tous, filles et garçons entre 19 et 25 ans. Les MRE portant la nationalité de leur pays d'origine sont-ils concernés, même s'ils sont binationaux.Tant qu’on a la nationalité, le service militaire sera une obligation, c’est une reconnaissance envers son pays”, affirme Ouammou (PPS - Parti du Progrès et du Socialisme) qui est également avocat. La double nationalité, au point de vue du droit, selon lui, n’empêche pas que l’on soit assujetti, car “une nationalité ne supprime pas l’autre”. Mais l'ambassade du Maroc en Belgique dément.

Alors que la  commission des affaires étrangères à la Chambre des conseillers s’apprête à entamer, demain, la discussion autour du projet de loi relatif au service militaire, “un comité de refus” rejetant cette obligation serait sur le point de voir le jour en Belgique. C’est ce qu’annonce le journal Belge La Dernière heure (DH), qui a réalisé à ce sujet une interview avec le rédacteur en chef du magazine Le Maroxellois, Khalil Zeguendi.

Dans cet entretien, repris notamment par le site d’information belge 7 sur 7, Zeguendi exprime clairement une inquiétude au sein de la communauté marocaine depuis l’annonce du retour au service miliaire. “Entre 70.000 et 100.000 jeunes sont concernés dans notre pays. S’ils étudient à ce moment-là, ils peuvent même être appelés jusqu’à leurs quarante ans”, a-il assuré à La Dernière Heure. Et d’ajouter que “les certificats médicaux délivrés par un médecin en Belgique ne permettront pas non plus d’y échapper”. 
En contestation au service militaire obligatoire, Zeguendi affirme alors qu’avec “les jeunes et les parents”, “un comité de refus” sera mis en place. 

Cette inquiétude, bien avant l’adoption du projet de loi à l’unanimité par la Chambre des représentants le 26 décembre, a également été au coeur des échanges au sein de la commission de la justice, de la législation et des droits de l’homme à qui avait été soumis le texte en premier. “Les Marocains résidant à l’étranger (MRE) sont des Marocains et en tant que tels, ils sont assujettis, selon le texte et la constitution marocaine qui s’oppose à toute discrimination. Toutefois, la question a été soulevée durant notre discussion du projet de loi”, déclare au HuffPost Maroc le député du PJD Jawad Iraki, membre de cette commission.

Comme pour d’autres catégories, dont les femmes, celle des MRE a alimenté le débat autour de “l’obligation” de ce service militaire auprès des députés. “Avec insistance et au côté d’autres groupes, nous avons proposé au gouvernement qu’il soit optionnel pour les MRE”, affirme-t-il. Et d’ajouter que le représentant du gouvernement, en l’occurrence, le ministre délégué chargé de l’Administration de la défense nationale, Abdellatif Loudyi, leur a indiqué qu’il en sera tenu compte dans la pratique”. 

Pour ce député, le débat que suscite le service militaire intervient en aval. “On aurait tout à y gagner si le débat avait été lancé en amont, mais c’est toujours une bonne chose qu’il y en ait un, actuellement”, estime-t-il, précisant, cependant, que constituer “un comité de refus” ne pèse pas lourd face au caractère d’une obligation imposée par la loi. Seul un amendement pourra changer la loi, rappelle Jawad Iraki, pour qui les canaux constitutionnels sont les meilleurs moyens d’y parvenir. “La constitution accorde le droit aux Marocains de présenter des pétitions et des manifestes. Ce sont des procédures par lesquelles on peut s’opposer et proposer des amendements dans les règles de l’art”, souligne-t-il.

Plus de temps à perdre, car, pour agir dans “les règles de l’art”, il faudra le faire incessamment, à en croire ce député. “Nous avons largement sensibilisé le gouvernement sur cette question d’obligation. Et tant que le texte de loi est à la deuxième Chambre, revenir avec insistance sur le sujet pourrait amener le gouvernement à intégrer cette exemption”, pense-t-il. 

La deuxième Chambre aura quelques jours pour apporter sa contribution au débat. La commission des affaires étrangères devra décortiquer le projet de loi et faire ses propositions avant de passer au vote par toute la Chambre en séance plénière, probablement la semaine prochaine. Mais d’ici là, un des membre de la commission, Abdellatif Ouammou, coordinateur du groupe d’action progressiste (PPS) se montre surpris par “le refus du service militaire” par certains. “C’est un peu paradoxal de se prétendre Marocain et de s’opposer à une loi visant justement à concrétiser la citoyenneté. Un MRE est en droit de la défendre”, estime-t-il.

Ouammou est convaincu qu’il faut assimiler l’objectif premier de cette loi et ne pas “comprendre de travers” le service militaire. “Ce n’est pas un engagement obligatoire pour aller en contingent aux frontières dans des zones de guerre, loin de là. Ici, il est question de permettre aux jeunes d’acquérir des valeurs, d’être fiers de leur patrie”, tient-il à préciser. 

Les MRE portant la nationalité de leur pays sont concernés. “Tant qu’on a la nationalité, le service militaire sera une obligation, c’est une reconnaissance envers son pays”, affirme Ouammou qui est également avocat. La double nationalité, au point de vue du droit, selon lui, n’empêche pas que l’on soit assujetti, car “une nationalité ne supprime pas l’autre”. Toutefois, l’application du service militaire pour les MRE devrait passer par la mise en place d’accords avec les pays d’accueil. “Bien entendu, sur le plan technique et pour résoudre les problèmes qui peuvent surgir, les départements concernés devront conclure des conventions bilatérales”, assure-t-il ainsi.

 

Démenti formel de l'ambassade du Maroc en Belgique

«Les binationaux ne sont pas concernés par cette mesure, sauf s’ils le souhaitent», a précisé mercredi l’ambassade du Maroc en Belgique.

«Renseignements pris à Rabat, les binationaux ne sont pas concernés par la mesure, sauf sur base volontaire», affirme-t-on à l’ambassade du Maroc en Belgique.

Le retour du service militaire obligatoire 12 ans après sa suppression vise notamment à améliorer «l’intégration dans la vie professionnelle et sociale» des jeunes, avait affirmé le palais royal marocain en août dernier. Cette nécessité ne concerne pas les jeunes marocains vivant à l'étranger qui cherchent à s'inserrer dans leur pays d'immigration.

Au Maroc, le chômage touche plus de quatre jeunes urbains sur dix, selon les données du Haut commissariat au Plan (HCP), l’institut national des statistiques. Le décrochage scolaire concerne deux jeunes sur trois, le taux de chômage moyen avoisine les 20%, la moitié des jeunes qui travaillent occupent des postes à bas salaires et 75% n’ont aucune couverture sociale, selon une récente analyse publiée par le Conseil économique et social marocain (CESE).

Selon le ministre de l’Administration de la Défense nationale, Abdellatif Loudiyi, quelque 10.000 conscrits seront appelés chaque année sous les drapeaux dès septembre 2019.

 

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