Le cri des anciens employés du transport urbain de Fès : un dossier en quête d’équité
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Hicham TOUATI - Le lundi 27 janvier, les anciens employés de la régie autonome de transport urbain de Fès ont manifesté devant le siège de la Wilaya de la région Fès-Meknès, portant à nouveau à la lumière un dossier complexe qui semblait pourtant réglé depuis des années. Pourquoi ces anciens salariés, intégrés à l’époque au sein de la société déléguée City Bus, se retrouvent-ils aujourd’hui dans une telle impasse ? Quels sont les obstacles qui empêchent la reconnaissance de leurs droits ?
Pour comprendre cette situation, il faut revenir à septembre 2012, date de la liquidation de la régie autonome de transport urbain. Les quelque 350 employés de l’agence ont alors été intégrés à City Bus, société en charge de la gestion déléguée du transport urbain. Cependant, en mai 2013, des tensions éclatent : les employés se mettent en grève pour revendiquer ce qu’ils considéraient comme des droits légitimes et des revendications justes. Ce mouvement, jugé illégal, à l'époque, par la direction de City Bus, entraîne l’intervention des autorités, la reprise des activités de l’entreprise et, finalement, le licenciement des grévistes.
Ces derniers décident de porter l’affaire en justice, espérant obtenir réparation. Après un an et demi de litige, un accord de conciliation est conclu sous la supervision de la commission régionale de conciliation, représentée par le pacha de la préfecture d’Agdal et les avocats des deux parties. Cet accord, basé sur l’article 41 du Code du travail, prévoyait l’indemnisation des employés licenciés, qui ont accepté de renoncer à toute action en justice en échange d’une compensation financière.
Pourtant, ce qui semblait être la conclusion d’un conflit se révèle être le début d’un nouveau chapitre d’injustice. Les anciens employés découvrent que la régie autonome, avant sa liquidation, n’a pas versé leurs cotisations au régime de retraite CIMR depuis 2009, les privant ainsi de leur plein droit à la retraite. À cela s’ajoutent des réclamations concernant des droits à la titularisation, des congés payés non perçus, et des cotisations non versées à la CNSS. Par ailleurs, leur adhésion à une association des œuvres sociales, financée par des prélèvements mensuels de leurs salaires, n’a donné lieu à aucune contrepartie, bien que cette association ait acquis des biens immobiliers, notamment des appartements à Tanger, qui restent hors de leur portée.
Aujourd’hui, ces anciens travailleurs se tournent vers les autorités, implorant l’intervention du wali et appelant à une solution juste et définitive. Comment expliquer que des citoyens ayant consacré des années de leur vie au service public soient encore dans l’attente de leurs droits fondamentaux ? L’État et les institutions concernées ne devraient-elles pas assumer leur part de responsabilité dans ce dossier qui mêle négligence administrative et atteinte aux droits des travailleurs ?
Au-delà des considérations légales, cette affaire soulève une question morale : ne serait-il pas temps de reconnaître la dignité et les sacrifices de ces hommes et femmes, en leur rendant ce qui leur est dû ? Que ce soit par le règlement des cotisations manquantes, la restitution des fonds liés aux œuvres sociales ou la réparation de l’injustice subie, une solution s’impose. L’heure est venue pour les responsables de mettre fin à cette tragédie sociale qui ternit l’image de l’administration et rappelle à tous que le respect des droits des travailleurs n’est pas une faveur, mais un devoir.