
Une nouvelle consécration pour Ruben Östlund. Le réalisateur suédois a remporté la prestigieuse Palme d'or du Festival de Cannes pour son film "Sans filtre" ("Triangle of Sadness"), une comédie acerbe sur la lutte des classes. Il avait déjà reçu la récompense suprême en 2017 avec "The Square", dans lequel il tirait à boulets rouges sur le monde de l’art contemporain.
Le réalisateur suédois va encore plus loin avec ce film qui égratigne la cupidité et le capitalisme avec férocité. « Je voulais secouer le public voire le choquer pour lui faire prendre confiance des dérives de notre société », a-t-il confié. Et ça a marché sur le jury.
Du cinéma mal élevé
Le cinéma de Ruben Ostlund, c’est du poil à gratter sur grand écran ! Le réalisateur prend un malin plaisir à mettre le spectateur mal à l’aise. Cela a sans doute amusé Vincent Lindon qui n’avait pas hésité à en faire de même avec Titane, bien que le film de Julia Ducourneau soit largement moins rigolo. Avec The Square, Ruben Ostlund avait déjà imposé un ton irrévérencieux qui a fait sourire tout en parlant de choses sérieuses. Cette fois Sans filtre, film joyeusement mal élevé, brocarde le capitalisme et ses scories avec une telle liberté de ton qu’il a tout pour attirer un public nombreux en salle.
Le sujet de Sans filtre : un couple de mannequins influenceurs en bisbille est invité à bord d’une croisière de luxe, auprès d’un oligarque russe négociant d’engrais – « Je vends de la merde », dit-il –, de vieilles rombières botoxées, de vendeurs d’armes, entre autres délicieux spécimens de l’hyperclasse internationale. Une tempête venue secouer le bateau au moment du dîner cinq étoiles transforme toute l’assemblée en geysers humains rendant tripes et boyaux, jusqu’à ce que les toilettes, prises d’assaut mais saturées, dégorgent – ce reflux généralisé étant, on l’aura bien compris, celui d’un capitalisme en phase d’indigestion terminale.
Le palmarès complet du 75e Festival de Cannes
- La Palme d’Or est attribuée au réalisateur suédois Ruben Östlund pour Triangle of Sadness (Sans filtre) ;
- Le Grand Prix est attribué à ex aequo à Close, du Belge Lukas Dhont et Des étoiles à midi, de la Française Claire Denis ;
- Le Prix Spécial de cette 75e édition du Festival de Cannes est attribué à Jean-Pierre et Luc Dardenne pour Tori et Lokita ;
- Le Prix de la mise en scène est attribué au réalisateur sud-coréen Park Chan-wook pour Decision to Leave ;
- Le Prix du jury est attribué à ex aequo à Le Otto Montagne (Les Huit Montagnes), de Charlotte Vandermeersch et Felix Van Groeningen, et Eo (Hi-Han) de Jerzy Skolimowski ;
- Le Prix du scénario est attribué au Suédois Tarik Saleh pour Boy from Heaven ;
- Le Prix d’interprétation masculine est attribué à Song Kang-ho, à l’affiche du film japonais Les Bonnes Etoiles, de Hirokazu Kore-eda
- Le Prix d’interprétation féminine est attribué à l’Iranienne Zar Amir Ebrahimi, à l’affiche du film Holy Spider, d’Ali Abbasi ;
- La Caméra d’or est attribuée au film américain War Pony, de Riley Keough et Gina Gammell ;
- La mention spéciale de la Caméra d’or est attribuée à Plan 75, de la réalisatrice japonaise Hayakawa Chie ;
- La Palme d’or du court-métrage est attribuée à Hai Bian Sheng Qi Yi Zuo Xuan Ya (The Water Murmurs), de la Chinoise Jianying Chen.