Partager sur :

Tunisie : la candidature d'un juif tunisien aux élections municipales fait le buzz

La formation islamiste tunisienne Ennahda a annoncé que Simon Slama, un juif tunisien mènerait la liste électorale qu'elle soutient à Monastir. Une annonce qui a fait grand bruit.

Cette candidature d'un Tunisien de confession juive aux élections municipales du 6 mai prochain dans une liste indépendante soutenue par le mouvement d'obédience islamique Ennahdha, fait l'objet d'une polémique entre partisans et détracteurs.

Sur les réseaux sociaux, certains y voient "une tactique d'Ennahdha pour faire le buzz et gagner la sympathie de l'Occident", tandis que d'autres la considèrent comme "un acte de citoyenneté ordinaire conforme aux traditions de tolérance propres à la Tunisie".

Technicien et commerçant de machines à coudre, Simon Slama, 56 ans, s'est présenté dans sa ville natale, Monastir, située sur le littoral du centre.

Il déclare vouloir servir le pays et la ville où il est né dans une conjoncture marquée par des difficultés économiques et sociales.

"J'ai choisi le mouvement Ennahdha parce que j'ai constaté qu'en raison de la crise que traverse le pays, tous les regards sont portés vers ce parti", explique-t-il dans un entretien à l'agence Anadolu.

Il assure "ne pas faire de différence entre la religion islamique et judaïque. Nous sommes tous des Tunisiens et nous devons mettre la main dans la main pour construire la Tunisie de demain", suggère-t-il en soulignant "l'importance des municipalités dans l'évolution de la société".

Simon Slama se dit "très attaché" à cette ville où il est retourné après des études à Strasbourg, en France, et "où il ressent le parfum de (ses) aïeux".

"La ville comptait par le passé 520 familles juives. Aujourd'hui, ma famille est la seule qui y est demeurée", note-t-il.

Plusieurs fois reporté, le scrutin municipal très attendu est le premier du genre que vivra ce pays d'Afrique du Nord, huit ans après la révolution dite du "jasmin" qui a fait chuter l'ancien régime dictatorial et déclenché ce qui est appelé "le printemps arabe".

Le parti d'obédience islamique, le seul qui a fait le plein de candidats dans la totalité des 350 municipalités du pays, a fait un autre coup d'éclat en présentant une femme en tête de liste dans la mairie de Tunis.

Souad Abderrahim, pharmacienne de son état et membre du bureau exécutif d'Ennahdha, briguerait, en cas de victoire, pour la première fois dans les annales, la mairie de la capitale.

Le président du bureau politique d'Ennahdha à Monastir, Adel Messaoud, affirme que son parti a donné une suite favorable à la demande de candidature de Simon Slama parce qu'elle est "conforme aux orientations d'Ennahdha qui est un parti civil ouvert qui a opté lors de son dernier congrès pour la séparation entre l'action politique de l'action de prédication".

"Notre regard sur les personnes n'est pas fondé sur la distinction entres le genres, la couleur ou les convictions religieuses. Le seul principe est celui de la citoyenneté", assure cet avocat.

Il considère que la polémique qu'elle a suscitée est "sans fondement et n'a pas lieu d'être".

"M. Slama, un citoyen originaire de Monastir où il vit avec sa famille, répond aux critères objectifs de candidature pour être un élu de la ville. Je le connais bien, c'est un voisin à moi qui est apprécié par ses concitoyens pour ses qualités humaines et a bonne réputation. Il est connu pour être serviable et intègre. S'il y avait quelque suspicion que ce soit sur sa personne, on ne l'aurait pas retenu", plaide-t-il.

Il fait remarquer que la Tunisie avait connu dans le passé des expériences similaires "avec nos frères juifs". 

"Au début de l'indépendance, un juif avait fait partie du gouvernement du temps de l'ancien président Bourguiba et même à Monastir, il y a eu dans le passé des édiles juifs", rappelle-t-il en réfutant la thèse selon laquelle Ennahdha visait à travers cette initiative gagner la sympathie de l'Occident en se présentant comme proche de la communauté juive.

"Nous sommes réellement un parti civil et ouvert. Il ne s'agit pas de plaire à quiconque. On a pris en compte l'intérêt général du pays qui vit une expérience démocratique unique dans le monde arabe, que nous voulons faire réussir avec la participation de tous les Tunisiens indépendamment de leur appartenance éthnique ou religieuse", martèle-t-il.

En attendant, la candidature de Slama, continuera de faire parler d'elle.

Partager sur :