Le président tunisien Béji Caïd Essebsi a annoncé, lundi soir, la rupture de la relation consensuelle qui le liait au mouvement d'obédience islamique Ennahdha.
S'exprimant lors d'une interview accordée à la chaîne privée Al Hiwar Ettounsi, le chef de l'Etat a déclaré que la décision a été prise au cours de l'entrevue qu'il a eue la semaine dernière avec le président d'Ennahdha, Rached Ghannouchi.
Selon le président tunisien, le consensus instauré avec Ennahdha lors du sommet qui avait eu lieu en 2015 à Paris entre lui et Rached Ghannouchi a permis d'asseoir "une stabilité relative" dans le pays.
"Aujourd'hui, il n'y a plus désormais de consensus entre Béji Caïd Essebsi et Ennahdha qui a choisi une autre voie. Ennahdha a laché la main de Béji Caïd Essebsi", a-t-il dit en attribuant cette décision à un différend au sujet du maintien ou non du chef du gouvernement Youssef Chahed.
Alors que plusieurs parties réclament le départ du chef du Gouvernement dont le parti Nida Tounes fondé par l'actuel président et dirigé actuellement par son fils Hafedh et la centrale syndicale UGTT, le mouvement d'obédience islamique insiste pour son maintien dans le souci d'assurer la stabilité politique, à un peu plus d'un an des élections législatives et présidentielle, prévues en 2019.
Le président Caïd Essebsi a, à ce sujet, souligné que le scrutin "aura bien lieu à la date prévue, soit en décembre 2019, ni avant ni après", coupant court aux rumeurs selon lesquelles il pourrait être reporté ou qu'il y ait des élections anticipées.
Il a, par ailleurs, réitéré son "conseil" à Youssef Chahed de requérir le renouvellement de la confiance de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) pour conforter sa légitimité à partir du moment où il dispose, à priori, de la majorité absolue des 109 voix requise.
Outre les 68 voix d'Ennadha qui lui sont acquises, le chef du gouvernement bénéficie du soutien du bloc de la Coalition nationale, nouvellement créée, forte de plus de 40 députés.
Le président tunisien a indiqué qu'il n'activera pas à l'article 99 de la Constitution qui l'autorise à obliger le chef du gouvernement à solliciter la confiance du parlement.
"Mais, en politique rien n'est définitif", a-t-il, cependant, noté.
S'agissant de Hafedh Caïd Essebsi actuel directeur exécutif de Nida Tounes secoué par une cascade de démissions de ses dirigeants réclamant son départ, il a nié tout favoritisme ou soutien absolu de sa part à son fils, ni toute idée d'en faire l'héritier du parti qu'il a fondé.
"C'est de l'injustice et de l'antagonisme", a-t-il rétorqué en accusant des partis qu'il n'a pas nommées d'en faire "un fonds de commerce".
Interrogé sur le différend qui oppose Hafedh Caïd Essebsi et Youssef Chahed, il a fait valoir que "si les deux partaient, la Tunisie n'en sera pas affectée pour autant, vu le grand nombre de compétences dont regorge le pays".
"Je n'ai rien contre Youssef Chahed auquel je souhaite plein succès, mais je lui conseille d'aller à l'ARP pour conforter sa position", a-t-il martelé.
D'un autre côté, le président tunisien qui termine dans environ un an son quinquennat, a plaidé pour une révision de la Constitution et de la loi électorale après son départ, faisant valoir que les deux documents ne sont pas adaptés à la situation que vit la Tunisie.
L'actuelle loi fondamentale instaure deux pouvoirs à la tête de l'exécutif : le président de la République dont les attributions sont limitées et le chef du gouvernements qui dispose d'une grande part du pouvoir.
De même, l'actuelle loi électorale favorise le vote sur les listes selon le mode proportionnel avec prise en compte des grand restes, alors que des voix suggèrent que le vote soit uninominal.