
Les autorités tunisiennes ont fait état, mercredi, d’un “retour progressif au calme” après des affrontements nocturnes ayant opposé ces deux derniers jours les forces de l’ordre et les manifestants dans plusieurs régions du pays.
Ces accrochage ont eu lieu à la suite du décès d’un journaliste-photographe qui s’est immolé par le feu, en signe de révolte contre sa condition sociale précaire.
Peu avant sa mort, Abderrazek Zorgui a mis en ligne une vidéo dans laquelle il attribue son acte au chômage et à la marginalisation dont souffre le gouvernorat de Kasserine, une région déshéritée du centre-ouest tunisien dont il est originaire.
Le porte-parole du ministère, Sofiane Zaâg, a fait état de l’arrestation de 13 personnes à Kasserine et de cinq autres à Tébourba, une ville proche de la capitale Tunis.
Les heurts les plus violents ont eu lieu à Kasserine où les agents de l’ordre ont dû faire usage de gaz lacrymogène pour riposter aux jets de pierres des manifestants qui ont bloqué les routes.
Selon la radio "ShemsFM", des militaires sont venus prêter main forte aux forces de l’ordre et ont été positionnés autour des établissements publics pour en assurer la sécurité.
Les troubles se sont étendus à d’autres régions de l’intérieur du pays, notamment à Jebeniana (sud) et Tébourba, une ville située à 30 km de Tunis, où les protestataires ont “semé la panique en incendiant des pneus et en vandalisant un train à l’aide de pierres”, selon le ministère de l’Intérieur.
À Tunis, des dizaines de manifestants se sont rassemblés sur l’avenue Bourguiba, la principale artère de la capitale, pour protester contre la cherté de la vie et la marginalisation des régions de l’intérieur, en scandant des slogans tels que “Basta” (ça suffit), “le peuple veut la chute du régime” et “y en a marre des nouveaux Trabelsi”, en allusion au clan des de la famille de l’épouse de l’ancien président Ben Ali, Leila Trabelsi.
Par ailleurs, le ministère de l’Intérieur a mis en garde contre “les informations erronées” relayées sur les réseaux sociaux au sujet des manifestations, faisant valoir qu’il s’agit de “ 'fake news' visant à embraser le pays”.
"De nombreuses fake news, anciennes photos et vidéos ainsi que des publications fictives sur des mouvements de protestations et d’émeutes à travers le pays sont en train d’être propagés pour inciter au chaos et à déstabiliser la sûreté publiqueS/T: le ministère l'intérieur fait état de 18 arrestations et met en garde contre "les fakes news" , soutient le ministère dans un communiqué publié mercredi.
D’un autre côté, le porte-parole du tribunal de première instance à Kasserine, Achref Youssefi a fait état de l’ouverture d’une enquête pour “soupçons d’homicide volontaire et non assistance à personne en danger” dans l’affaire du journaliste décédé.
Selon lui, les personnes qui ont assisté à la scène du suicide n’ont pas dissuadé le journaliste de mettre fin à ses jours.
Il a annoncé l’arrestation d’un “suspect” mis à la disposition du juge d’instruction en charge de l’affaire, et ce “à titre préventif” en attendant la fin de l’enquête.
Dénonçant “les conditions déplorables des journalistes tunisiens”, le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) a décrété une grève générale pour le lundi 14 janvier prochain.
Dans un communiqué, le SNJT estime que "le drame" du journaliste Abderrazek Zorgui dénote "les conditions déplorables que vivent les journalistes" et "la dure réalité du secteur des médias" en Tunisie.
Le bureau exécutif du SNJT déplore “l'absence de toute volonté politique d'appliquer les lois”, accusant le gouvernement de "ne pas appliquer les mesures annoncées il y a deux ans, qui devaient garantir leurs droits économiques et sociaux".
Placée sous le slogan "dignité", la grève sera observée le jour de l'anniversaire de la révolution de la chute de l’ancien régime qui a conduit à la fuite de l’ex-président Zine El Abidine Ben Ali vers l’Arabie saoudite où il est réfugié depuis.