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Est-il encore rentable de faire le plein d'essence au Luxembourg ?

Est-il encore rentable pour les frontaliers de passer la frontière pour faire le plein ? La question hante les propriétaires des stations service qui se sont multipliées à la frontière française, côté Luxembourg. Le quotidien Luxemburger Wort y apporte une réponse dans un article de Simon Laurent Martin intitulé "Vers la fin du tourisme à la pompe ?".

Les chiffres parlent d'eux-mêmes: selon un décompte de 2019, il existe pas moins de 234 stations-service au Luxembourg. Cela correspond à une moyenne d'une station-service pour 30.000 habitants, c'est presque six fois plus qu'en France, rien que ca ! Toutefois, une bonne partie de ces dernières se situent à proximité immédiate des frontières belges ou encore françaises. Car en effet, en dehors des Luxembourgeois, ces stations s'adressent aussi et surtout aux habitants des pays où les carburants sont plus chers. Des villes comme Rombach-Martelange, à la frontière belge, sont d'ailleurs spécialisées dans ce marché. Ainsi, le village abrite une multitude de stations-service qui sont avant tout prisées des automobilistes belges.

Toutefois, face à la récente hausse fulgurante des prix du carburant, ce modèle économique a-t-il encore un avenir ? Le «tourisme à la pompe» est-il encore rentable ? On le sait, depuis quelques années, le gouvernement souhaite réduire ses émissions de CO2 en augmentant les accises sur le carburant. Essayons aujourd'hui de nous focaliser sur les chiffres avant de revenir à une analyse plus globale du phénomène. Nous reviendrons également sur les raisons d'une telle augmentation des prix prochainement.

Mercredi dernier était donc à marquer d'une pierre blanche pour les vendeurs de carburants luxembourgeois. Le diesel affichait un prix au litre encore jamais vu auparavant: 1,50€/l. La différence est devenue minime entre le diesel et l'essence. Ainsi, le litre de Super 95 s'échange désormais à 1,553€/l tandis que le Super 98 est à 1,645€/l, des chiffres records également.

La fin de l'eldorado pour les frontaliers ?

Est-ce que cela signifie pour autant la fin de l'eldorado pétrolier pour les automobilistes frontaliers ? Pas forcément puisque les chiffres restent toutefois plus faibles que dans les pays voisins, qui connaissent également une hausse des prix. En France par exemple, le diesel affichait jeudi dernier un prix de 1,726€/l tandis que le Sans Plomb 95 (E5) était en moyenne vendu au prix de 1,798€/l (et le E10 à 1,769 €/l). Le Sans Plomb 98 était quant à lui vendu à 1,858 €/l, une différence toujours notable avec les prix pratiqués au Luxembourg.

En Belgique, le constat est similaire. Jeudi dernier, il fallait débourser 1,816€ par litre de diesel et 1,77€/l pour du Super 95. En ce qui concerne le Super 98, celui-ci affichait un prix de 1,874€/l. Là encore, avantage au Luxembourg même si l'écart ne se creuse plus tant que ça. La différence est de l'ordre des 10% seulement. En ce qui concerne la diesel, la différence est bien plus marquée puisqu'il y a trois ans, celui-ci était 30% plus cher. 

Mais dans les faits, à quoi ces données correspondent ? Prenons un exemple concret dans le cadre d'un plein de 50 litres. Pour le diesel, l'automobiliste français fera une économie de 11,3€ sur son plein. L'automobiliste belge fera quant à lui une économie plus intéressante de 15,8€. Dans le cas d'un plein d'essence de 50 litres, un Français gagnera 12,25€ en faisant le plein au Luxembourg tandis que le Belge épargnera 10,85€. 

Encore faut-il que le trajet jusqu'au Grand-Duché soit rentabilisé. Si on part du principe que le prix moyen du kilomètre est de 50 centimes (ce chiffre varie de 30 centimes à 3,8€ pour les voitures les plus luxueuses), il est possible de déterminer jusqu'à quelle distance il est profitable de se rendre au Grand-Duché. Il ressort donc que le Luxembourg reste toujours intéressant pour les Français et les Belges vivant à une trentaine de kilomètres de la frontière.

 

Pour la Fédération des Exploitants de Stations-Service, malgré l'augmentation des prix, le Luxembourg reste attractif pour les habitants des pays voisins. «Forcément, avant, les gens venaient de bien plus loin pour venir se ravitailler en carburant au Luxembourg. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. De plus, beaucoup de clients pensent que c'est nous, les exploitants, qui fixons les prix alors que ce n'est pas le cas du tout. Nous gagnons même moins lorsque les prix montent. Quoi qu'il en soit, le prix des carburants luxembourgeois reste attractif pour les habitants des pays voisins, ce qui n'est plus le cas pour les camionneurs belges par exemple.» 

«Un risque de perte d'attractivité»

Quid également des jours, semaines et mois à venir. La tendance finira-t-elle par s'inverser ? «Tout dépendra du prix du baril qui ne souhaite pas descendre. Il faut également voir l'évolution de la taxe carbone qui est également amenée à augmenter dans les prochaines années. Il y a donc un risque qu'à l'avenir, le Luxembourg risque de ne plus être intéressant en ce qui concerne le carburant.» De quoi faire craindre une hécatombe des pompistes indépendants ? «Ce sont effectivement eux qui sont les plus punis au bout du compte.»

Pour conclure, rappelons que le Luxembourg est le pays européen à avoir connu la plus grosse augmentation du prix des carburants entre décembre 2020 et janvier 2022.  L'industrie pétrolière représente 2% du PIB du Grand-Duché et génère environ deux milliards d'euros chaque année.

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