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L'imam Iquioussen en fuite, inscrit au fichier des personnes recherchées

L'imam Iquioussen en fuite, inscrit au fichier des personnes recherchées

Le Conseil d'Etat, plus haute juridiction administrative française, a donné mardi son feu vert à l'expulsion vers le Maroc d'un prédicateur réputé proche des Frères musulmans, conformément à la demande du ministre de l'Intérieur, qui lui reproche notamment des "propos antisémites".

(AFP) - Vivant dans le nord de la France, à Lourches, l'imam Hassan Iquioussen, 58 ans, tenait, selon les éléments recueillis par la préfecture du Nord dont l'AFP a eu connaissance, des discours "haineux envers les valeurs de la République dont la laïcité" et développait "des thèses antisémites".

Il lui est reproché aussi d'inciter "à une forme de séparatisme" et d'alimenter "des thèses complotistes autour de l'islamophobie".

Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, qui a accusé par voie de presse l'imam de semer "un jihadisme d'atmosphère", assume de prôner la fermeté face à une "minorité d'emmerdeurs" parmi les étrangers vivant en France. Il a précisé mardi soir, depuis le perron de son ministère, que "depuis 2017, 786 étrangers radicalisés avaient été expulsés" et que "74 d'entre eux" l'ont été au cours "des derniers mois".

Il avait annoncé le 28 juillet l'expulsion de M. Iquioussen, né en France mais de nationalité marocaine. L'expulsion avait été suspendue le 5 août par le tribunal administratif de Paris, qui a estimé qu'elle porterait une "atteinte disproportionnée" à la "vie privée et familiale" de ce père de cinq enfants et 15 petits-enfants français.

Le ministère de l'Intérieur avait fait appel de cette décision et mardi, le Conseil d'Etat a infirmé la décision du tribunal administratif.

C'est "une grande victoire pour la République", s'est réjoui M. Darmanin sur Twitter. "Il sera expulsé du territoire national", a-t-il ajouté.

Mais en début de soirée, les policiers venus l'interpeller à son domicile, à Lourches, près de Valenciennes (Nord) ne l'ont pas trouvé, selon une source proche du dossier. Considéré comme en fuite, il est désormais inscrit au fichier des personnes recherchées (FPR), a-t-on ajouté de même source en évoquant l'hypothèse que le prédicateur soit en Belgique.

L'avocate de l'imam, Lucie Simon, a réagi sur Twitter en estimant que cette décision symbolisait "un Etat de droit affaibli", déplorant "un contexte alarmant de pression de l’exécutif sur le judiciaire".

"Le combat judiciaire continue, le tribunal administratif de Paris sera amené à se pencher sur le fond du dossier prochainement, et Hassan Iquioussen étudie la possibilité de saisir de nouveau la CEDH", a-t-elle ajouté.

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avait refusé de suspendre l'expulsion début août, expliquant qu'elle n'accordait des mesures provisoires de suspension "qu'à titre exceptionnel", lorsque le requérant était exposé "à un risque réel de dommages irréparables".

«Discours antisémite»

Dans son avis, le Conseil d'Etat estime que son "discours antisémite", "réitéré (...) après ses excuses de 2004", et son "discours systématique sur l'infériorité de la femme", dans "des vidéos toujours disponibles sur internet dont les dernières ont été réalisées en 2021", constituaient bien "des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination ou à la haine".

Et s'il reconnaît que ses attaches en France sont "fortes", il souligne que les enfants de l'imam "sont majeurs et ne dépendent plus de leur père et que son épouse, qui est également de nationalité marocaine, ne se trouve pas dans l’impossibilité de se déplacer au Maroc et de l’y rejoindre le cas échéant".

En outre, il n'est "pas établi" qu'un renvoi au Maroc "puisse l’exposer à un risque de traitements inhumains et dégradants", selon le Conseil d'Etat.

Lors de l'audience vendredi, la représentante du ministère français de l'Intérieur avait dénoncé le "double discours" d'Hassan Iquioussen, le dépeignant comme "un prédicateur charismatique qui a su acquérir une légitimité au sein d’un très large auditoire et qui, depuis des années, répand des idées insidieuses qui n’en sont pas moins des provocations à la haine, à la discrimination, à la violence".

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