
Au moment où l'Algérie tente de relancer son vieux projet de gazoduc transaharien, la Cédéao a fait le choix réaliste de celui du gazoduc Nigeria-Maroc et recommande de le fusionner avec son propre Projet d’extension du réseau de gazoduc de l’Afrique de l’Ouest (Wagpep). Détails.
Le Maroc d'une part et l'Algérie de l'autre défendent bec et ongles chacun un projet devant relier l'Afrique de l’Ouest, le Maghreb et Europe. Mais malgré la remise au goût du jour du vieux projet de gazoduc transsaharien par l’Algérie en fin novembre dernier suite au déplacement de son ministre des Affaires étrangères Sabri Boukadoum, les jeux sont déjà faits.
«J’ai rencontré mon frère Geoffrey Onyeama (le ministre nigérian des Affaires étrangères, ndlr) à Abuja. Nous avons eu des discussions fructueuses sur le renforcement des relations bilatérales et la mise en œuvre de projets stratégiques en cours de développement, notamment l'autoroute transsaharienne Lagos-Alger, le pipeline transsaharien et le câble à fibre optique», a tweeté Boukadoum après sa rencontre avec son homologue nigérian.
En clair, avec ce déplacement, l’Algérie voulait relancer le vieux projet du gazoduc Nigeria-Algérie via le Niger et torpiller celui plus ambitieux, réaliste initié par le Maroc et le Nigeria.
Seulement l’espoir du ministre des Affaires étrangères algérien a été rapidement douché par la Communauté économiques des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cédéao). Quelques jours après sa visite en pleine crise sanitaire, le Département en charge de l’Energie et des mines de la Cédéao a réagi en annonçant l’organisation, les 9 et 10 décembre 2020 à Ouagadougou, au Burkina Faso, d’une réunion des experts sur l’état d’avancement de la mise en œuvre du Projet d’extension du réseau de gazoduc de l’Afrique de l’Ouest (Wagpep). Il s'agit du projet devant relier le Nigeria au Sénégal, en passant l'ensemble des 13 autres pays. Il s'exécute en plusieurs phases, dont le première concerne quatre pays, à savoir le Nigeria, le Togo, le Bénin et le Ghana.
Ont pris part à la réunion de Ouagadougou, des représentants des ministres en charge des Hydrocarbures et de l’Energie des 15 pays de la Cédéao et plusieurs institutions dont l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uémoa), l’Autorité du gazoduc de l’Afrique de l’ouest (Agao), la Société du gazoduc de l’Afrique de l’ouest (WAPCo), l’Unité de préparation et de développement des projets d’infrastructures de la Cédéao (PPDU), la Nigerian national petroleum corporation (NNPC) et la Société nationale des hydrocarbures et des mines du Maroc (Onhym).
Ce choix est justifié selon la Cédéao par le fait que le tracé du gazoduc Nigeria-Maroc et celui du Projet d’extension du réseau de gazoduc de l’Afrique de l’Ouest (Wagpep), «concourent à des objectifs communs qui sont la valorisation des ressources gazières de la région et l’approvisionnement des pays en énergie propres y compris les Etats membres de la Cédéao». Une partie du projet Wagpep étant déjà construite.
Du coup, et suite à la réunion de consultation des Etats membres sur le processus de développement du Wagpep qui s’est tenue les 9 et 10 décembre 2020, un mémorandum d’entente est en cours de discussion entre la Commission de la Cédéao et les promoteurs du gazoduc Nigeria-Maroc (Nnpc et Onhym).
Dans leur communiqué, les participants ont demandé à ce que «les études de faisabilité à conduire pour le projet de gazoduc incluent l’analyse de faisabilité pour la fusion des deux projets en un projet unique et que les résultats soient présentés aux Etats membres en vue d’une décision finale».
En clair, et suite à cette réunion, le projet de gazoduc Nigeria-Maroc devient en quelque sorte un projet de gazoduc Cédéao-Maroc.
Par ce choix, les pays de la Cédéao enterrent le projet de la transsaharienne algérienne qui date des années 1980 et qui n'a jamais pu voir le jour.
Il est resté dans les placards avant d’en sortir au lendemain de l’annonce de la mise en place d’un gazoduc Nigeria-Maroc en marge de la visite du roi Mohammed VI au Nigeria en 2016. Il s’agit plutôt d’un gazoduc ouest-africain reliant les pays de la Cédéao à l’Europe via le Maroc.