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Tunisie : le nouvel accord sécuritaire avec l’Algérie fragilise Kaïs Saïed

Un accord de coopération militaire et sécuritaire signé entre la Tunisie et l’Algérie continue de susciter une vive controverse en Tunisie, fragilisant davantage la position déjà contestée du président Kaïs Saïed sur la scène politique nationale.

Un accord stratégique… mais controversé

Le 7 octobre 2025, Tunis et Alger ont officialisé un accord de défense et de coopération sécuritaire, élargi par rapport à celui de 2001, destiné à renforcer la coordination militaire, l’information et la lutte contre les menaces transfrontalières. Il a été présenté par les autorités des deux pays comme une étape logique pour faire face à des défis sécuritaires communs dans la région maghrébine. 

Cependant, depuis la mi-décembre, des médias et plateformes proches de l’opposition tunisienne ont diffusé ce qu’ils affirment être le texte de cet accord, relançant des inquiétudes profondes sur la souveraineté nationale et le manque de transparence autour de la signature. 

Un débat politique intense en Tunisie

La principale critique des opposants est double :

  • Absence de transparence : aucun communiqué détaillé n’a été publié officiellement par Tunis, ce qui a laissé place à des rumeurs, interprétations parfois alarmistes et interprétations hostiles sur le contenu réel des clauses de sécurité.
  • Perception de dépendance : dans certains cercles politiques et au sein de l’opinion publique, cet accord est perçu comme une mise sous influence sécuritaire d’Alger, notamment après la fuite d’éléments supposés du texte qui seraient interprétés comme accordant à l’Armée algérienne des prérogatives opérationnelles sensibles sur le territoire tunisien — une lecture sévèrement contestée par les autorités des deux pays. T

En réponse, Kaïs Saïed a nié l’authenticité des documents fuités, qualifiant ces versions de « fabriquées » pour nuire à l’État et attisant la division interne. Il a également appelé à rejeter les interprétations critiques, affirmant que les relations avec l’Algérie sont historiques et fondées sur le respect mutuel.

Une question de souveraineté ou une crise politique ?

Pour de nombreux analystes tunisiens et mouvements politiques, la controverse ne se limite pas à l’accord lui-même mais reflète un désarroi plus profond au sein de la société tunisienne face au style de gouvernance de Saïed, souvent qualifié d’autoritaire par l’opposition. Depuis plusieurs années, les institutions démocratiques tunisos ont été fortement remises en question, et la montée de critiques autour de cet accord contribue à cristalliser les inquiétudes sur la transparence gouvernementale et le respect des équilibres constitutionnels. 

Des mouvements civiques exigent désormais la publication complète des clauses de l’accord, arguant que seule la transparence peut dissiper les malentendus et garantir le respect de la souveraineté tunisienne. 

Un contexte régional compliqué

La diplomatie tuniso-algérienne s’inscrit dans un paysage maghrébin marqué par des défis sécuritaires, économiques et géopolitiques. L’Algérie, principal voisin et acteur régional influent, cherche à renforcer ses partenariats stratégiques, notamment pour contrer des menaces transnationales et stabiliser les zones frontalières. Mais ces efforts s’exercent dans un climat régional où la méfiance et les rivalités historiques restent présentes, notamment autour des questions de souveraineté et d’autonomie d’action de chaque État.

Vers une recomposition politique ?

La polémique autour de cet accord pourrait profiter politiquement à l’opposition tunisienne, déjà fragilisée par des années de tensions autour des libertés publiques, de la centralisation des pouvoirs et des difficultés économiques. En focalisant le débat sur la souveraineté nationale, les critiques de Saïed entendent renforcer leur position face à un pouvoir jugé opaque et autoritaire

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