Maglor avec AFP - La ville de Khan Younès demeure au cœur des affrontements entre l'armée israélienne et le Hamas palestinien dans le sud de Gaza, avec une intensification des combats jeudi. Cette escalade survient après des tirs meurtriers, fortement condamnés, dirigés contre un refuge de l'ONU accueillant des personnes déplacées par la guerre.
Des tirs de chars israéliens contre un bâtiment de l’agence onusienne pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) à Khan Younès avaient déjà fait mercredi au moins «neuf morts et 75 blessés», a indiqué Thomas White, responsable de l’organisation à Gaza, où des sources médicales et onusiennes craignent que le bilan s’alourdisse.
Philippe Lazzarini, chef de l’Unrwa, a affirmé que le centre d’accueil était «clairement» identifié et que ses coordonnées avaient été «partagées avec les autorités israéliennes». Il a fustigé «une violation flagrante des règles fondamentales de la guerre». Les États-Unis, premiers alliés d’Israël, ont dit «déplorer» ces tirs et appelé à ce que les sites de l’ONU à Gaza soient «protégés».
L’armée israélienne a indiqué avoir «encerclé» Khan Younès et appelé la population locale à partir vers Rafah, plus au sud, ville qui subit également des bombardements réguliers. Mais les combats rendent dangereux les déplacements vers cette ville où se massent la majorité des 1,7 million de Palestiniens déjà déplacés par la guerre.
L’attaque du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre a entraîné la mort de plus de 1.140 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles. Quelque 250 personnes ont été enlevées et emmenées à Gaza, dont une centaine ont été libérées fin novembre lors d’une trêve en échange de prisonniers palestiniens. Selon le même décompte, 132 otages sont toujours dans le territoire, dont 28 seraient morts.
En représailles, Israël pilonne sans relâche le petit territoire palestinien, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opération terrestres de l’armée israélienne ont tué 25.700 Palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, et fait plus de 65.000 blessés selon le ministère de la Santé du Hamas.
En Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 et où le Hamas n’est pas représenté, plus de 380 Palestiniens ont été tués par les soldats ou les colons israéliens, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.
Au 111ème jour de la guerre, la situation humanitaire et sanitaire demeure critique dans la bande de Gaza où au moins 1,7 million de personnes (plus de 80% de la population) ont été déplacés vers le sud, dans un espace de plus en plus exigu.
Abritée dans des camps de fortune, la population manque de tout. Depuis plus de trois mois, l’enclave palestinienne subit un siège total de l’armée israélienne, sans approvisionnement en eau, en nourriture, en médicaments, en électricité et en carburant. Les aides humanitaires passent au compte-gouttes, alors que les agences onusiennes et différentes ONG sur place s’alarment de risques de famine et de la propagation de maladies.
Parallèlement, des manifestants israéliens ont bloqué mercredi soir une artère clé de Tel-Aviv pour exhorter le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu à accepter une pause dans les combats, voire un cessez-le-feu.
«Ça suffit! (...) Nous ne voulons pas que les otages nous reviennent sous forme de cadavres, nous en avons assez des bombardements à Gaza, nous en avons assez de voir des enfants morts, nous voulons envoyer un message clair: la population en Israël réclame un accord, réclame la paix», a déclaré Sapir Sluzker Amran, une manifestante.
Netanyahu vs. Qatar
Le Qatar, l’Egypte et les États-Unis tentent actuellement une médiation afin d’en arriver à une nouvelle trêve, plus longue, à Gaza, incluant la libération d’otages et de prisonniers.
Mais dans un enregistrement obtenu par la chaîne israélienne 12, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a jugé «problématique» le rôle de médiateur du Qatar, pays où est établie la direction politique du Hamas. «Je n’ai aucune illusion à leur égard. Ils ont des moyens de faire pression (sur le Hamas, ndlr). Et pourquoi? Parce qu’ils les financent», a-t-il affirmé en hébreu selon cet enregistrement.
Le Qatar s’est dit «consterné» par ces déclarations, qui risquent d’«entraver et saper le processus de médiation, pour des raisons qui semblent servir davantage sa carrière politique» que les «otages israéliens», a souligné dans la nuit le ministère des Affaires étrangères.
Le conflit exacerbe par ailleurs les tensions régionales, notamment au large du Yémen où les rebelles Houthis ont tiré mercredi des missiles contre deux navires américains, les forçant à rebrousser chemin.