Maglor - Le ministre français de l'Intérieur, Bruno Retailleau, n’a pas mâché ses mots à l’encontre de l’eurodéputée Rima Hassan, après son vote contre une résolution du Parlement européen demandant la libération de l’écrivain algérien Boualem Sansal. Ce vote, adopté ce jeudi 23 janvier, réclame la libération immédiate de Sansal, incarcéré depuis la mi-novembre en Algérie. Ce texte a été soutenu par une large majorité de députés européens, avec 533 voix pour et 24 contre, mais a suscité une division notable au sein de la gauche radicale, notamment avec le vote contre de Rima Hassan, eurodéputée de La France insoumise (LFI).
Un vote controversé
Boualem Sansal, écrivain engagé et critique du régime algérien, a été emprisonné en novembre 2024 pour avoir critiqué le pouvoir algérien dans ses œuvres et ses prises de position. À 75 ans, il est également malade, ce qui a intensifié les appels à sa libération. La résolution européenne demandait non seulement sa libération mais aussi celle d'autres personnalités incarcérées pour avoir exprimé des opinions contraires au régime algérien.
Pour Christophe Gomart, eurodéputé des Républicains, la résolution était une manière de sauver la vie de Sansal, en dénonçant un régime algérien qui opprime ses citoyens et ceux qui osent critiquer son autoritarisme. De son côté, Jordan Bardella, président du Rassemblement national, a souligné que l'écrivain était poursuivi pour avoir dénoncé la dérive autocratique du gouvernement algérien et son indulgence envers l'idéologie islamiste.
La réaction de Bruno Retailleau
Le vote de Rima Hassan a particulièrement fait réagir à droite et à l'extrême droite. Bruno Retailleau, qui ne cache pas sa colère, a qualifié l'eurodéputée de « suppôt » du régime algérien. « C’est une alliée du régime algérien, un soutien, un suppôt », a-t-il déclaré sur Europe1. Le ministre a dénoncé le fait que Rima Hassan ait voté contre une résolution demandant la libération d’un homme malade, qualifiant son comportement de « politiquement scandaleux ». Il a également interpellé La France insoumise, leur demandant de clarifier si ce vote représentait la position de leur parti au niveau européen.
Rima Hassan se justifie
De son côté, Rima Hassan a défendu son vote, soulignant qu'elle ne s'opposait pas à la libération de Boualem Sansal, mais à l’instrumentalisation de son cas à des fins politiques. Elle a affirmé que la résolution était le fruit d'une coalition de droite et d'extrême droite et que son vote contre visait à éviter que l’affaire Sansal ne soit utilisée comme un levier politique contre l'Algérie. « Ne pas voter ce texte, ce n’est pas s’opposer à la libération de M. Sansal, mais s’opposer à l’instrumentalisation de son cas », a-t-elle expliqué sur X (anciennement Twitter).
Elle a également invité les défenseurs de l’écrivain à déployer la même énergie pour défendre les droits humains des Palestiniens, soulignant ainsi ses préoccupations pour les droits humains à une échelle mondiale.
Un contexte tendu
L’affaire Boualem Sansal a ravivé les tensions entre la France et l’Algérie, particulièrement depuis les déclarations de l’écrivain sur le média Frontières, dans lequel il a critiqué la position de l'Algérie sur le territoire marocain, une question sensible entre les deux pays. Le régime algérien aurait mal pris ces déclarations, ce qui pourrait expliquer en partie son arrestation.
Le vote de Rima Hassan, ainsi que les déclarations acerbes de Bruno Retailleau, mettent en lumière les profondes divisions politiques en Europe concernant les droits humains et les relations diplomatiques avec l'Algérie. Si pour certains, la libération de Boualem Sansal est une question de principes fondamentaux des droits de l'homme, pour d'autres, il s'agit d'un dossier plus complexe, imbriqué dans des enjeux géopolitiques.
L’affaire est loin d’être terminée, et le débat sur le rôle de l’Union européenne dans les affaires internes des pays tiers continue d’alimenter les discussions sur la scène politique européenne.