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Douzième jour de manifestations en Iran : la fille d’un ex-président arrêtée, une ONG annonce 76 tués

Douzième jour de manifestations en Iran : la fille d’un ex-président arrêtée, une ONG annonce 76 tués

L’ONG Iran Human Rights qui effectue le macabre décompte depuis le début des protestations annonce le chiffre de 76 morts dont six femmes et quatre enfants. Partout en Iran, la rue se soulève mais le pouvoir ne veut rien entendre

(AFP) - Pour la douzième nuit consécutive, les Iraniens sont descendus dans la rue mardi dans plusieurs villes du pays pour protester contre la mort d’une jeune femme arrêtée par la police des mœurs, malgré la répression qui a fait des dizaines de morts. Selon des médias d’opposition basés hors d’Iran, les manifestations ont repris mardi soir dans différentes villes. Mais des militants ont affirmé que les perturbations des connexions Internet rendaient de plus en plus difficile la transmission des images.

Pour les dirigeants iraniens, les manifestants sont des « émeutiers ». Ces derniers jours, le président iranien Ebrahim Raïssi a appelé les forces de l’ordre à agir « fermement contre ceux qui portent atteinte à la sécurité du pays et du peuple » et le chef du pouvoir judiciaire, Gholamhossein Mohseni Ejei, a exclu toute « indulgence » envers les instigateurs des « émeutes ».

Au moins 76 personnes ont été tuées dans les manifestations dans 14 provinces du pays, selon l’ONG Iran Human Rights basée à Oslo

Selon un dernier bilan donné mardi par l’agence de presse iranienne Fars, « environ 60 personnes ont été tuées » depuis le début des manifestations le 16 septembre. La police, citée par l’agence officielle Irna, a fait état de 10 policiers morts mais il n’était pas clair si ceux-ci figuraient parmi les 60 morts.

« Mort au dictateur »

L’ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo, a elle fait état lundi soir d'« au moins 76 morts » dont « six femmes et quatre enfants », affirmant avoir obtenu des « vidéos et des certificats de décès confirmant des tirs à balles réelles sur des manifestants ». En outre les autorités ont fait état de l’arrestation de plus de 1 200 manifestants depuis le 16 septembre. Des militants, des avocats et des journalistes ont également été arrêtés, d’après des ONG.

Et mardi, selon l’agence de presse iranienne Tasnim, Faezeh Hachemi, la fille de l’ex-président Ali Akbar Hachemi Rafsandjani, a été arrêtée à Téhéran pour « avoir incité des émeutiers à manifester ». Ex-députée et militante des droits des femmes, elle avait été inculpée en juillet par la justice iranienne de propagande contre la République islamique et de blasphème sur les réseaux sociaux.

Les protestations, qui ont lieu tous les soirs depuis le 16 septembre, ont éclaté après le décès à l’hôpital de la jeune Iranienne de 22 ans, Mahsa Amini, arrêtée trois jours auparavant à Téhéran pour non-respect du code vestimentaire strict pour les femmes en République islamique d’Iran, qui doivent se couvrir les cheveux en public.

Lundi soir, elles ont été ponctuées des mêmes slogans de « Mort au dictateur » dans la capitale et dans d’autres villes, selon des témoins. À Sanandaj, chef-lieu de la province du Kurdistan (nord-ouest), d’où était originaire Mahsa Amini, des femmes sont montées sur des toits de voitures et enlevé leur voile, d’après des images publiées par l’IHR.

Matraques, lacrymogènes, balles

À Tabriz (nord-ouest), des policiers tirant du gaz lacrymogène contre les manifestants apparaissent sur une vidéo diffusée également par l’IHR, où l’on entend des coups de feu. Et à Téhéran, des manifestants montent sur les toits d’immeubles pour lancer des slogans antigouvernementaux entrecoupés de « Femme, Vie et liberté », a raconté un habitant.

De récentes vidéos ont montré la police anti-émeute frappant des manifestants à coups de matraque et des étudiants déchirant de grandes photos du guide suprême iranien Ali Khamenei et de son prédécesseur, l’imam Khomeiny, fondateur de la République islamique. Et d’après des défenseurs des droits humains, les policiers ont aussi tiré des plombs et à balles réelles sur les protestataires qui ont lancé des pierres, incendié des voitures de police et mis le feu à des bâtiments publics.Les autorités iraniennes démentent tout contact physique entre la police des mœurs et la jeune Mahsa Amini après son arrestation à Téhéran, et disent attendre les résultats de l’enquête.

Accusant les manifestants de porter atteinte à la sécurité et de détruire les biens publics, elles ont fait état de l’arrestation de plus de 1 200 d’entre eux. Selon des ONG internationales, des militants, avocats et journalistes ont aussi été interpellés.

Cité mardi par l’agence officielle Irna, le ministre de la Santé Bahram Einollahi a accusé les manifestants d’avoir détruit 72 ambulances. L’opposition à l’étranger accuse les autorités d’utiliser les ambulances pour transporter les forces de sécurité.

Condamnations internationales

Les autorités en Iran dénoncent des « complots étrangers » derrière le mouvement de contestation, pointant du doigt les États-Unis, son ennemi juré. Pour limiter les protestations, elles ont bloqué l’accès à Instagram et à WhatsApp. Les connexions sur internet sont elles perturbées.

Face à la répression, les Occidentaux, l’ONU et les ONG internationales ont haussé le ton. Après le Canada qui a décidé d’imposer des sanctions contre une dizaine de responsables et d’entités iraniens dont la police des mœurs, la France a dit examiner avec ses partenaires européens « les options disponibles » face « aux atteintes massives aux droits des femmes et aux droits de l’Homme en Iran ».

Et l’ONG américaine Freedom House a appelé « les gouvernements à se tenir aux côtés des courageux manifestants en Iran et à demander des comptes aux responsables iraniens pour leurs abus ».

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