
Près de 70 chefs d'Etat et de gouvernement se sont réunis dimanche à Paris pour célébrer le centenaire de l'armistice de la Grande guerre, un rassemblement hors norme et sous haute sécurité qu'Emmanuel Macron a voulu mettre à profit pour vanter le multilatéralisme dans les relations internationales.
(AFP) - Donald Trump, Angela Merkel, Vladimir Poutine, Benjamin Netanyahu, Recep Tayyip Erdogan, Justin Trudeau, Mohammed VI, Beji Caid el Sebsi, Ahmed Ouyahia, Jean-Claude Juncker, Denis Sassou Nguesso, le couple grand-ducal de Luxembourg, et bien d'autres ont participé à une grande cérémonie sous l'Arc de Triomphe ce dimanche à Paris, en haut de la célèbre avenue des Champs-Elysées, sous lequel gît le soldat inconnu et brûle perpétuellement sa flamme du souvenir, rappelant l'ampleur d'un conflit aux 18 millions de morts.
Les premiers des quelque 70 chefs d'Etat et de gouvernement attendus ont commencé à arriver peu après 8h15 au palais de l'Elysée, accueillis par Emmanuel et Brigitte Macron.
De là, ils se sont ensuite rendus sur la place de l'Etoile où se trouve l'Arc de Triomphe pour la cérémonie. Donald Trump s'est rendu directement sur place.
Une cérémonie sobre
Après un cérémonial militaire, les dignitaires se sont regroupés au pied de l'Arc de Triomphe, sous un abri installé pour l'occasion alors qu'une pluie fine s'abattait sur Paris.
Le célèbre violoncelliste américain Yo-Yo Ma a interprété la Sarabande de la Suite n°5 pour violoncelle en do mineur de Jean-Sébastien Bach, la chanteuse béninoise Angélique Kidjo a chanté en hommage aux troupes coloniales, des lycéens ont lu des témoignages de 1918, et Emmanuel Macron a prononcé un discours avant de raviver la flamme au son du «Boléro» de Ravel.
"Refusons le repli, la violence et la domination"
«Additionnons nos espoirs au lieu d'opposer nos peurs», a lancé Emmanuel Macron dimanche aux 72 leaders mondiaux réunis à Paris, les exhortant au «combat pour la paix» en refusant «le repli, la violence et la domination», critiquant le «nationalisme» dont se revendique notamment Donald Trump.
Dans son allocution pour célébrer le centenaire de l'armistice du 11 novembre 1918, le président français a déclaré: «Ensemble, nous pouvons conjurer ces menaces que sont le spectre du réchauffement climatique et de la dégradation de notre nature, la pauvreté, la faim, la maladie, les inégalités, l'ignorance».
Il a aussi critiqué le nationalisme, dont s'est revendiqué plusieurs fois ces dernières semaines Donald Trump. «Le patriotisme est l'exact contraire du nationalisme. Le nationalisme en est sa trahison», a dit le président français. «Un mondialiste est une personne qui veut que le monde s'en sorte, sans vraiment se préoccuper de notre pays (...). Vous savez ce que je suis ? Je suis un nationaliste», avait notamment déclaré M. Trump en octobre.
Emmanuel Macron défend dès qu'il en a l'occasion le multilatéralisme, ce socle idéologique des relations internationales depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, de plus en plus dénoncé par certains électeurs et dirigeants dans le monde, au nom de la défense des intérêts nationaux.
En mémoire de «l'immense cortège des combattants» de la Grande Guerre, «venus du monde entier, parce que la France représentait pour eux tout ce qu'il y avait de beau dans le monde», il a appelé ses pairs à refuser «la fascination pour le repli, la violence et la domination».
«Souvenons-nous ! N'oublions pas !», a-t-il plaidé, «cent ans après un massacre dont la cicatrice est encore visible sur la face du monde». «Puisse ce rassemblement ne pas être seulement celui d'un jour».
Forum sur la paix
Le clairon a joué «La sonnerie du cessez-le-feu», et les dignitaires sont repartis en direction du palais présidentiel pour un déjeuner, avant que certains d'entre ne se rendent au Forum de Paris sur la paix, attaquant la deuxième partie de cette journée point d'orgue pour Emmanuel Macron, après une semaine de commémorations en France.
A la grande halle de la Villette, dans l'est parisien, chefs d'Etat et de gouvernement, mais aussi représentants d'ONG, entrepreneurs, membres de la société civile, ont débattu de la gouvernance mondiale avec, là encore, le message politique clair en faveur du multilatéralisme.
Ils devront à l'issue du forum promouvoir des projets et des «solutions concrètes aux problèmes transfrontaliers». Car une des idées-force est de démontrer «la capacité des instruments du multilatéralisme à aider les gens», selon un des organisateurs, alors que de plus en plus de dirigeants et d'électeurs de par le monde semblent douter de l'efficacité du modèle à les préserver de certains méfaits de la mondialisation.
Plusieurs de ses plus fervents défenseurs, Emmanuel Macron, Angela Merkel, Justin Trudeau, Antonio Guterres plaideront pro domo devant une assistance globalement acquise. «Le système multilatéral est essentiel pour développer et financer les efforts de lutte contre la menace de changement climatique», a plaidé dans une tribune au Journal du dimanche le président de la Banque mondiale - une des incarnations du multilatéralisme - Jim Yong Kim.